Chez un ancien peuple, il y avait une loi qui ordonnait de graver sur un monument public, toutes les grandes actions que faisait le prince ; on élevait une colonne dans le temple, on la montrait au prince le premier jour de son règne, et on lui disait : « Voici le marbre où l’on doit graver le bien que tu feras ; voilà le burin dont on doit se servir ; que la postérité vienne lire ici ton bonheur et le nôtre. » D’abord on n’y grava rien que de vrai ; un prince eut le malheur de ne faire aucun bien à ses peuples, il mourut sans qu’un seul caractère fût tracé.
En effet les parents dont le lien des lois n’assure point l’union, perdent leurs enfants, autant qu’il est en eux ; le père et la mère pouvant toujours se séparer, l’enfant abandonné de l’un et de l’autre, doit rester exposé à devenir la proie des chiens ; et si l’humanité publique ou privée ne l’élevait, il croîtrait sans qu’on lui transmît ni religion, ni langue, ni aucun élément de civilisation.