* * * — Ce qu’il y a à craindre pour l’homme de lettres, ce n’est point le foudroiement, la mort complète de sa cervelle : c’est la douce imbécillité, l’insensible ramollissement de son talent. […] * * * — Combien y a-t-il de pièces de théâtre, dont le dénouement ne soit pas amené par l’interception d’une lettre ou sur la surprise d’une conversation derrière un rideau. Toute l’imagination du théâtre de ces jours-ci, consiste à convertir la lettre en télégramme, et à remplacer le rideau par quelque chose comme la porte d’un cabinet d’aisance. […] Arrivé dans la ville de Tcheou-Sou, avec des lettres de recommandation pour le mandarin qui lui faisait les honneurs des curiosités de la ville, il lui demandait d’être mis en rapport avec quelque femme galante de la localité, étant venu, lui disait-il, pour étudier les mœurs du pays. […] Là-dessus, envoi par le mandarin d’une lettre de son plus beau pinceau sur papier rouge, et le lendemain, le Français était introduit dans une petite maison, meublée de jolies choses, et toute remplie de fleurs.
Né de parens pauvres & obscurs, doué d’une ame fiere, incapable des bassesses qui procurent des protecteurs, il fut presque toujours aux prises avec le besoin & le désespoir, & auroit peut-être succombé à ce dernier, si des gens de Lettres que son courage & les talens qu’il annonçoit avoient intéressés à son sort, n’eussent attiré sur lui les bienfaits de quelques Grands. Il avoit obtenu par leur crédit, une pension du Roi, lorsqu’il a été enlevé aux Lettres de la maniere la plus malheureuse.