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771. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIII. Retour de Molière à Paris » pp. 225-264

Sa réputation fut assez grande, sous ce rapport, pour qu’une tradition, dont les échos, il est vrai, n’ont été recueillis que très tard, lui attribuât des scènes tout italiennes, par exemple, l’anecdote de la Lettre improvisée, qui se rapporte à l’époque où Molière résidait à Pézenas et fréquentait, dit-on, la boutique du perruquier Gély. Il s’agit d’une jeune fille qui a reçu une lettre de son amant, lequel est à l’armée ; elle ne sait pas lire et voudrait qu’on lui lût cette lettre. […] La fillette est charmée, et quand d’autres lecteurs, plus sincères, essayent de lire la lettre à leur tour, elle la leur arrache dès les premières lignes en disant qu’ils ne savent pas lire aussi bien que le monsieur de chez Gély. Si l’anecdote était authentique, nous craindrions bien que, dans cette circonstance, Molière n’eût encore été qu’imitateur : ces fausses lettres, faisant succéder rapidement les impressions de chagrin et de joie, fournissaient un trop excellent prétexte à la pantomime, pour n’avoir pas été exploitées par les artistes italiens. […] Mais pour les contemporains, la distance qui le séparait des autres ne paraissait pas aussi grande qu’elle nous le paraît, à nous ; témoin ce curieux tableau que possède le Théâtre-Français et qui porte pour inscription, écrite en lettres d’or : Farceurs Français et Italiens, depuis soixante ans.

772. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La Grande Mademoiselle. » pp. 503-525

Si elle tint quelque temps l’épée comme une guerrière, elle a beaucoup produit la plume à la main : non seulement elle a laissé des Mémoires intéressants et très véridiques, dont on a dit « qu’ils sont assez mal écrits pour que l’on puisse s’assurer qu’ils sont d’elle », mais on a encore de sa façon de petits romans, des portraits, des lettres. […] Mademoiselle, dans des lettres adressées à Mme de Motteville en 1660, lui parle de la conversation comme étant, « à votre goût et au mien, dit-elle, le plus grand plaisir de la vie, et presque le seul à mon gré ». […] Il adressa une lettre à Mademoiselle pour la remercier et la féliciter de sa prouesse : « C’est un coup qui n’appartient qu’à vous, lui écrivait-il, et qui est de la dernière importance. » Comme on lui rendait compte d’un conseil de guerre auquel elle avait assisté et où elle avait donné son avis : M. le Prince dit que les résolutions prises dans un conseil où j’avais bien voulu être devaient être suivies, quand elles ne seraient pas bonnes, mais que celles que l’on avait prises étaient telles que le roi de Suède (Gustave-Adolphe !) […] Pendant les séjours un peu forcés qu’elle fit dans les terres de ses apanages, elle prit goût aux lettres et au bel esprit. […] Au sortir de là, toute remplie de son objet, elle écrivit une longue lettre à Mme de Motteville, qui lui répondit à son tour.

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