Malgré ma prédilection pour le poëte grec, l’Amphitrite du poëte latin me paraît plus grande encore que sa Discorde, dont le grand critique ancien a dit qu’elle était moins la mesure de la déesse que celle de l’élévation du poëte. […] C’est cette force du rythme, cette puissance des sons, qui m’a fait penser que peut-être je prononçais un peu légèrement entre l’image du poëte latin et l’image du poëte grec ; qu’il y avait telle emphase d’expression, telle plénitude d’harmonie qui me forcerait de donner à la figure d’Homère une grosseur proportionnée à sa hauteur ; et je me suis dit à moi-même : voyons, ouvrons son ouvrage, récitons ses vers et rétractons-nous, s’il le faut. […] Tout ce que je sais, c’est que j’ai bien fait de me méfier de mon jugement ; c’est que Virgile a tout gâté lorsqu’il a traduit cet endroit par ces vers où il ne reste presque pas le moindre vestige de la poésie et des images d’Homère : parva metu primo, … etc. j’aime mieux le plat latin du juif helléniste, qui a dit de l’ange exterminateur des premiers-nés de l’égypte : stans replevit omnia… etc. ah !
Si gaulois, en effet, La Fontaine, que quand l’influence grecque et latine, qui a marqué de son puissant et ineffaçable cachet l’esprit gaulois, a atteint les plus forts et les plus grands génies de notre langue, La Fontaine est celui qui y a résisté davantage. […] Pour les Latins, ce fut la même chose. […] Vous chercheriez vainement dans tout le monde latin deux figures comme celles de Louis XI, par exemple, — qui eut aussi du terrible quelquefois, — le gaulois et bonhomme Louis XI, et comme celle de Henri IV, ce gaulois mâtiné de gascon.