Professeur au Collège de France, le seul établissement d’enseignement qui se soit conservé à travers les siècles, toujours semblable à lui-même dans son organisation comme dans son esprit, l’asile par excellence de la recherche libre et désintéressée, membre de l’Académie des inscriptions et de l’Académie française, ces créations de la monarchie réorganisées par la Révolution, l’une représentant l’érudition, l’autre le talent littéraire, Ernest Renan avait conscience que l’âme de la France moderne vivait en lui plus qu’en tout autre de ses contemporains. […] Il a consacré à l’une un volume qui est son chef-d’œuvre, et un des chefs-d’œuvre de la littérature française, à la seconde un ouvrage en sept volumes.
Cette série de tableaux est, pour le lecteur, l’occasion d’apercevoir, en une vive antithèse dont l’historien ne force point les traits et n’exagère pas les contrastes, deux sociétés, l’une confinée dans les montagnes d’une île farouche, l’autre installée sur le territoire d’un royaume glorieux qui semble être l’asile de la politesse, du bon goût, des mœurs élégantes, de la vie aisée. […] Cette aire, peu étendue, derrière laquelle bleuissent les masses profondes de la forêt de Soignes, est traversée par deux larges chaussées, pavées de grès, venant l’une de Nivelles, l’autre de Charleroi.