Ce passant qui faisait arrêter l’autre, était-ce pour affaire à citer en justice, pour vol, ou dettes, ou rapt, ou séduction ? […] Tel braverait les arrêts de la justice et serait sourd aux injonctions des magistrats, qui redoute d’encourir le ridicule en s’assimilant dans le monde à l’acteur qu’il vit plaisamment berner au théâtre. […] Justice des spectateurs assemblés. […] On convient que le penchant du peuple à la satire facilite les moyens d’exciter sa dérision ; d’accord : le parterre est malin, mais il ne l’est qu’envers ce qui mérite le blâme : peu lui importe qu’il s’amuse de la pièce ou de l’auteur, il a ce caractère de justice que prend toute réunion d’hommes ; impitoyable pour le mauvais, il ne tolère pas qu’on tourne le bon en raillerie. […] Néanmoins je ne puis reconnaître spécialement le misanthrope dans un homme que courrouce la ruine d’une famille opprimée, et qui, rempli de l’espoir du triomphe de la justice au milieu des hommes, s’élance au secours des malheureux, plaide leur cause à ses risques et périls, et la gagne victorieusement.
De mon côté, je dois vous rendre cette justice, que vous avez pendant dix ans dépensé ces revenus comme je le désirais, en loyal neveu qui fait bravement la fête. […] Toute la table éclate en rires d’ironique approbation ; victimes et bourreaux se réconcilient pour couvrir de communes huées celui qui a prêché la justice. […] Les choses humaines ont rarement cette unité symétrique et tranchante que nos passions, notre orgueil ou nos intérêts d’un jour leur voudraient donner. « L’histoire date ses justices », a dit Michelet. […] Jamais elle n’accouplera, dans ses sentences, le nom de Mirabeau avec les noms sinistres de Danton, de Robespierre et de Marat « L’histoire date ses justices ! […] Nous avons pour nous le droit ; nous avons pour nous la justice, et le sentiment de la justice et du droit nous donnera cette force morale qui commande la victoire.