Au lieu de cette œuvre généreuse et fière de vérité et de justice qu’une plume monarchique et catholique pouvait seule nous donner, nous avons un ouvrage qui a moins de grandeur, moins de sévérité et moins de portée, mais qui mérite cependant que la Critique s’y arrête, car il a été écrit dans un but évidemment plus élevé que la plupart des livres de ce triste temps. […] Nettement, dans son Histoire de la Littérature sous le Gouvernement de Juillet, n’a mis que de la sympathie partout où il aurait dû mettre de la discussion, de la justice, de la sévérité. Et cette sympathie, qui a remplacé la controverse, c’est-à-dire l’examen, c’est-à-dire le procès que l’Histoire fait aux choses et aux hommes, et pour lesquels elle a comme la Justice une balance et un glaive, cette sympathie à tout venant, il ne l’a pas même gouvernée.
Là, plus qu’ailleurs, se sont marqués les rapides contrecoups de la France sur l’imagination et la pensée des hommes : d’abord, l’action des lettres françaises et de cette liberté spéculative reçue avec tant d’ardeur par les Italiens, depuis le noble philanthrope Beccaria jusqu’au noble poëte Alfieri ; bientôt après, un sentiment tout opposé, l’inquiétude, la résistance, soulevées dans quelques âmes du moins par les instincts de liberté et de justice contre le despotisme de la conquête et de l’opinion ; enfin, comme un dédommagement de tout, l’association plus ou moins apparente ou réelle du peuple assujetti dans les grandeurs du peuple conquérant assujetti lui-même. […] Perdre la domination au dehors, le droit national au dedans, l’indépendance dans la justice, la libre pensée dans la vie privée, plier sous la défaite, le despotisme et l’inquisition, c’était trop à la fois pour un peuple. […] » À ces demandes le poëte répond comme un inspiré : « Le Seigneur a étendu sa main toute-puissante ; il a revêtu de nuées ta lumière ; il a donné sa voix à tes flots déchaînés, et paré de son arc ton front terrible. » Après ces grandeurs de la nature, après le soleil de Cuba, les forêts de la Virginie, ce qui possède l’âme d’Heredia, ce qui la fortifie et l’élève, c’est l’amour de la liberté, mais aussi de la justice, de la modération, de tout ce qui manquait aux révolutions du Mexique, tour à tour célébrées et maudites par le poëte.