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540. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Macaulay »

Son Jacques II, que je n’ai pas à juger ici, et son Guillaume III, qui en est le corollaire, ne sont, au fond, qu’une thèse whig très passionnée… Du reste, dès sa jeunesse, le whig tenait si fort Macaulay, que, dans son article sur Milton, — certainement une des plus belles choses qu’il ait écrites et l’une des plus belles qu’on ait écrites sur ce grand poète, — il se laisse emporter par son whigisme de la manière la plus… juvénile dans un hors-d’œuvre brillant, audacieux et colère. […] IV Or, ces instincts de Macaulay qu’il n’a pas assez écoutés, nous en pouvons juger la supériorité et la justesse dans les autres articles purement littéraires. […] Tout ce qui écrivait voulut écrire dans cette espèce de rhythme, oserai-je dire, dans cette forme équilibrée et docte où le critique pouvait se montrer aussi grand à sa manière que l’homme qu’il critiquait s’était montré grand à la sienne, et créer à son tour, comme l’homme dont il jugeait l’œuvre avait créé.

541. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Jean Richepin »

L’auteur de La Chanson des Gueux a été jugé et condamné pour ce livre de poésies. Mais je ne sache pas que la condamnation judiciaire qui l’a frappé ait supprimé le livre ; je ne sache pas qu’elle puisse l’ôter des mains qui l’ont acheté et de la mémoire de ceux qui l’ont lu ; je ne sache pas, enfin, que cette condamnation doive empêcher la Critique littéraire de rendre son jugement aussi, non sur la chose jugée, qu’il faut toujours respecter pour les raisons sociales les plus hautes, mais sur les mérites intellectuels d’un poète au début de la vie4 et aux premiers accents d’un talent qui chantera très ferme plus tard, si j’en crois la puissance de cette jeune poitrine. […] Richepin, quels que soient son passé et son caractère, qu’on n’a pas à juger ici, il est poète dans ses vers, il y a la sincérité du poète, et c’est à l’évidence de l’accent qu’on le reconnaît, et que, sans cette méprisable envie, le cancer de la littérature, on l’aurait, à la première vue, universellement reconnu.

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