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1345. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre premier. Les caractères généraux et les idées générales. » pp. 249-295

— Autant que nous pouvons en juger, la nature n’en fournit pas. […] Autant que nous en pouvons juger par l’observation, il n’y a pas de parcelle de matière en repos ou en mouvement qui, prise en elle-même, et abstraction faite des sollicitations perturbatrices, ne s’adapte à cette conception. […] Nous construisons l’utile, le beau et le bien, et nous agissons de manière à rapprocher les choses, autant que possible, de nos constructions. — Par exemple, étant données des pierres éparses et brutes, nous les supposons équarries, transportées, empilées à l’endroit où nous voulons habiter, et, conformément à l’idée du mur ainsi construit, nous construisons le mur réel qui nous préservera du vent. — Étant donnés les hommes qui vivent autour de nous, nous sommes frappés d’une certaine forme générale qui leur est propre ; nous remarquons à un plus haut degré, tantôt chez l’un, tantôt chez l’autre, les signes extérieurs de telle qualité ou disposition bienfaisante pour l’individu ou pour l’espèce, agilité, vigueur, santé, finesse ou énergie93 ; nous recueillons par degrés tous ces signes ; nous souhaitons contempler un corps humain en qui les caractères que nous jugeons les plus importants et les plus précieux se manifestent par une empreinte plus universelle et plus forte, et, s’il se trouve un artiste chez qui ce groupe de conditions conçues aboutisse à une image expresse, à une représentation sensible, à une demi-vision intérieure, il prend un bloc de marbre et y taille la forme idéale que la nature n’a pas su nous montrer. — Enfin, étant donnés les divers motifs qui poussent les hommes à vouloir, nous constatons que l’individu agit le plus souvent en vue de son bien personnel, c’est-à-dire par intérêt, souvent en vue du bien d’un autre individu qu’il aime, c’est-à-dire par sympathie, très rarement en vue du bien général, abstraction faite de son intérêt ou de ses sympathies, sans plus d’égard pour lui-même ou pour ses amis que pour tout autre homme, sans autre intention que d’être utile à la communauté présente ou future de tous les êtres sensibles et intelligents.

1346. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIe entretien. Littérature latine. Horace (1re partie) » pp. 337-410

César jugeait comme nous de ces différents caractères attribués aux différents tempéraments des hommes de son temps. […] Cicéron fut jugé digne de la mort ; il la reçut en héros et en philosophe, certain de la vengeance du ciel et de la terre. […] Quand on lit un conte original de l’Arioste à côté de l’imitation de ce conte par La Fontaine, on éprouve la même déception : on ne peut juger de la différence des métaux qu’en les pesant dans la même balance ou qu’en les faisant sonner sur la même table de marbre ; Horace pèse et sonne l’or dans cette fable ; La Fontaine pèse et sonne la plume d’un imitateur plus naïf que puissant.

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