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2636. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

Daignez observer, Madame, que je ne suis point Welche ; je suis Suisse, et si j’étais plus jeune, je me ferais Russe.  » Enfin arrive le premier partage de la Pologne, ce que Catherine appelle « un accord fait entre la cour de Vienne, le roi de Prusse et moi, qui a un peu augmenté mes possessions. » Voltaire se plaint un peu, non pas de ce qu’on ait partagé la Pologne, mais de ce qu’on ne l’ait pas prévenu qu’on avait l’intention de la partager et de ce qu’on ne lui ait parlé que de pacification quand il s’agissait de conquête ; mais, du reste, il est ravi. […] Voulant mettre un de ses ouvrages sous le nom d’un jeune Père Jésuite, réel ou imaginaire, il écrit au duc de Praslin en 1704 : « Vous pèserez, quand il en sera temps, l’importance extrême de mettre cela sous le nom d’un jeune Jésuite, qui, grâce à la bonté du Parlement, est rentré dans le monde et qui, comme Colletet et tant d’autres, attend son dîner du succès de son ouvrage. […] Les catholiques n’en ont ni à Londres, ni en plusieurs autres pays.  » Enfin il s’efforce, très loyalement, de tracer les limites où la tolérance à l’égard des opinions religieuses doit s’arrêter et dans son chapitre très médité : Seuls cas où l’intolérance est de droit humain (Traité de la Tolérance, XIII) il les trace ainsi : « Pour qu’un gouvernement ne soit pas en droit de punir les erreurs des hommes, il est nécessaire que ces erreurs ne soient pas des crimes ; elles ne sont des crimes que quand elles troublent la société ; elles troublent la société dès qu’elles inspirent le fanatisme ; il faut donc que les hommes commencent par n’être pas fanatiques pour mériter la tolérance. » — Avec ce texte tout gouvernement est en droit d’interdire quelque religion et même quelque secte philosophique qu’il voudra. « Si [par exemple] quelques jeunes Jésuites… ont débité des maximes coupables, si leur institut est contraire aux lois du royaume, on ne peut s’empêcher de dissoudre leur compagnie et d’abolir les Jésuites pour en faire des citoyens…  » — Avec ce texte tout gouvernement dont les maximes ne seront pas identiques à celles des Jésuites sera en droit de les détruire, trouvant coupables les maximes qui ne sont pas les siennes ; et tout gouvernement pourra faire des lois contraires aux Jésuites, et, démontrant ensuite que les Jésuites sont contraires à ces lois, ce qui sera peut-être facile, sera en droit de les détruire. — « On en dira autant des Luthériens et des Calvinistes. […] C’en était fait des « bourreaux », des « Busiris en robes » et des Jansénistes, et de ces gens qui dans le procès du duc d’Aiguillon osaient « inculper un pair du royaume », alors que le roi « déclarait que ce pair, n’avait rien fait que par son ordre », ce qui, par conséquent, « était vouloir faire le procès au roi lui-même. » — Il « bat des mains quand il voit que la justice n’est plus vénale », et dit hautement « que ce règlement est le plus beau qui ait été fait depuis la fondation de la monarchie. » Maupeou est « un homme de génie et d’un mérite distingué. » Pour lui, il a « pris parti contre nos seigneurs sans aucun motif que son équité et sa juste haine contre les assassins du chevalier de la Barre et du jeune d’Etallonde, sans imaginer seulement qu’il y eût un homme qui pût lui en savoir gré. » Cela le brouille un peu avec Mme du Deffand et tout à fait avec Choiseul ; mais il n’importe : « Je serai fidèle à votre grand’maman [Mme de Choiseul] et à Monsieur son mari, écrit-il à Mme du Deffand, tant que j’aurai un souffle de vie ; cela est bien certain. […] Elle doit plaindre la fin tragique d’un jeune homme qui a commis une extravagance ; elle doit démontrer la rigueur excessive d’une loi faite dans un temps grossier et ignorant ; mais il ne faut pas que la philosophie encourage à de pareilles actions ni qu’elle fronde les juges qui n’ont pas pu juger autrement qu’ils ont fait… La tolérance dans une société doit assurer à chacun la liberté de croire ce qu’il veut ; mais cette tolérance ne doit pas s’étendre à autoriser l’effronterie de jeunes étourdis qui insultent audacieusement à ce que le peuple révère.

2637. (1865) Introduction à l’étude de la médecine expérimentale

Beaumont fit-il une expérience quand il rencontra ce jeune chasseur canadien qui, après avoir reçu à bout portant un coup de fusil dans l’hypocondre gauche, conserva, à la chute de l’eschare, une large fistule de l’estomac par laquelle on pouvait voir dans l’intérieur de cet organe ? […] Il institua ses expériences en particulier sur des singes ou sur de jeunes porcs, et il décrivit les instruments et les procédés employés pour l’expérimentation. […] Nous dirons seulement ici d’une manière générale que, pour l’étude des tissus, les animaux à sang froid ou les jeunes mammifères sont plus convenables, parce que les propriétés des tissus vivants, disparaissant plus lentement, peuvent mieux être étudiées. […] Cependant je ne saurais m’empêcher de faire des vœux pour que mon pays, qui se montre le promoteur et le protecteur de tout progrès scientifique et qui a été le point de départ de cette ère brillante que parcourent aujourd’hui les sciences physiologiques expérimentales44, possède le plus tôt possible des laboratoires physiologiques vastes et publiquement organisés de manière à former des pléiades de physiologistes et de jeunes médecins expérimentateurs.

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