Rodrigue, à cette enivrante parole, est redevenu héros, un jeune lion respirant la flamme : « Est-il quelque ennemi qu’à présent je ne dompte ? […] Corneille n’a extrait et dû extraire qu’un Cid, modèle d’amour et d’honneur, tel qu’il le fallait pour arracher des larmes au jeune d’Enghien et à cette valeureuse jeunesse. […] Ce que Chimène a en elle de femme, d’éternellement femme, d’éternellement cher et sympathique aux jeunes cœurs, s’accuserait mieux encore par contraste, si on la suivait en détail dans cette comparution maussade devant la Chambre du haut syndicat littéraire et devant le Conseil des Prudents.
Le jeune lieutenant d’artillerie, Napoléon Bonaparte, concourra bientôt pour l’un de ces prix96. — Carat a appelé Raynal le grand maître des cérémonies de la philosophie au xviiie siècle : sur la fin il s’en croyait bonnement le grand pontife ou le plénipotentiaire en titre, et s’exagérait sa puissance morale. […] Sir Samuel Romilly qui, jeune et voyageant en Suisse, avait vu l’abbé Raynal en cette même année 1783, se montre encore plus sévère. […] Ce n’est point seulement par ce discours, dont le thème philosophique était « les vérités et les sentiments qu’il importe le plus d’inculquer aux hommes pour leur bonheur », que le nom de Bonaparte se trouve à bon droit rattaché au souvenir de l’abbé Raynal : le jeune lieutenant d’artillerie, dans sa première veine d’enthousiasme, avait désiré connaître le célèbre écrivain et lui avait rendu visite en passant à Marseille.