— Nous avons prouvé que tous les phénomènes intellectuels, sensation, représentation, projection au dehors, conscience du moi et de son existence continue, sont inexplicables sans la volonté ; il en est de même des phénomènes affectifs. […] Tout psychologue est obligé, — même quand il prétend n’admettre que des sensations, soit nouvelles, soit renouvelées, — d’admettre encore que l’être vivant n’est pas neutre entre ses sensations, qu’il y a toujours élection de l’une plutôt que de l’autre, un choix non intellectuel au début, mais spontané et inévitable, par conséquent un vouloir. […] « Il doit, répond-il, être partout l’apanage des centres sensoriels et de leurs annexes, concourant à l’exercice de nos processus intellectuels. » Fort bien ; mais, selon nous, cet « apanage » tient à ce que les centres sensoriels sont eux-mêmes indivisiblement appétitifs et moteurs.
Mais cela n’importe pas, puisque précisément elles ont été choisies pour donner l’impression d’un cerveau anonyme et du parfait servilisme intellectuel. […] Peu à peu, et nécessairement, une idée, une sensation, telle émotion vitale ou intellectuelle, se trouve associée à l’expression toute faite dont la lecture évoqua jadis dans le cerveau cette même idée, cette même sensation, cette même émotion. […] Nous avons « la sphère d’influence — la sphère diplomatique — les sphères politiques — une sphère plus étendue — la sphère intellectuelle — la sphère morale — la sphère d’activité — une sphère plus élevée — la sphère des idées — la sphère des progrès démocratiques — la sphère des intérêts matériels, etc. », toutes locutions où « sphère » n’évoque plus aucune image, sinon en certains esprits irrespectueux ; non seulement le mot est arrivé au dernier période de l’abstraction, mais il semble même, la plupart du temps, n’avoir qu’une valeur de redondance oratoire, ne correspondre à rien.