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540. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) «  Mémoires de Gourville .  » pp. 359-379

Il est né heureux, il a une étoile ; mais ce bonheur, on le sait, se compose toujours, chez ceux qui le possèdent, de mille finesses et adresses, de mille précautions imperceptibles dont les gens malencontreux ne se doutent pas. […] Après cet heureux succès de Bordeaux, il a une sorte de faveur. […] Colbert finit pourtant par se rendre, et l’heureux Gourville, qui est le meilleur ami de M. le Prince, se trouve à la fois dans la familiarité de Louvois, dans celle de Colbert, également bien à Chantilly, à Meudon et à Sceaux, de même que M. de Lionne, dans ses dernières années, le consultait à Suresnes. […] Il a la connaissance des hommes et de l’extension morale. » Cette expression heureuse et neuve m’a toujours frappé ; elle s’appliquerait bien à Gourville.

541. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Innocent III et ses contemporains »

De tous, Innocent III peut-être fut le plus heureux. […] Heureuse chance déjà, car la douleur apprend aux hommes bien autre chose que la pitié. […] C’était un de ces événements terribles même dans ce qu’ils ont de plus heureux, car s’ils ne portent pas aux nues, ils écrasent ; leur bonheur se retourne contre l’homme qui n’en a pas usé, et fait croire que la fortune s’est prostituée. […] Comme il était sans cesse exposé à périr victime de l’enthousiasme religieux qu’il inspirait, il frappait du bâton, pour l’écarter, cette foule qui voulait entendre sa voix et toucher ses vêtements, mais les blessés baisaient le sang de leurs blessures, heureux et fiers de ce qu’il coulait sous les mains de l’homme de Dieu.

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