Il semble tout d’abord, pour le moi humain, comme pour l’Etre universel que cette utilité s’exprime dans la joie de connaître : tous les efforts de l’homme, pour augmenter la somme de ses sensations heureuses au détriment de ses déplaisirs, se heurtent, ainsi qu’on l’a montré, à cette faculté de mécontentement qui transforme l’assouvissement de ses convoitises en une sensation d’ennui ou en un malaise nouveau : à cette fin, que les individus semblent poursuivre et qu’ils ne réalisent jamais un surcroît de bien-être, il semblerait donc qu’il convienne do substituer cette autre qui se montre sans cesse et par chaque effort accomplie, l’embellissement et l’enrichissement du spectacle phénoménal offert à l’esprit. […] Que l’on se place au point de vue de l’intellectualisme tenant la vie pour un moyen dont la connaissance est le but, ou que l’on se place au point de vue de l’illusion vitale tenant la connaissance pour un moyen, dont la vie heureuse est le but, ce que l’on se proposait de mettre ici en évidence, c’est, d’une part, que selon la rigueur du principe bovaryque, chacune de ces conceptions, qui tend à envahir tout le champ du réel, ne reçoit elle-même sa réalité que des limites que lui inflige la conception contraire ; c’est, d’autre part, que dans l’une et l’autre hypothèse, toute l’activité dépensée dans le monde a pour principe unique l’utilité humaine sous l’un ou l’autre de ses deux aspects, qu’il lui faut en sorte toujours supposer pour but de satisfaire une utilité de connaissanceou de satisfaire une utilité vitale.
Et quelle heureuse précision dans le vers suivant ! […] J’aurais mieux aimé que La Fontaine eût exprimé le sens de l’idée suivante : Heureux celui qu’un seul avertissement engage à triompher de sa passion favorite !