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33. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Le Sahara algérien et le Grand Désert »

Ce mérite inespéré n’était ni l’observation, ni l’étude, ni le renseignement, ni la science exacte et forte, technique et claire, ni enfin aucune des qualités substantielles qu’on est accoutumé de demander aux écrits d’un homme de guerre, instruit et pénétrant, et qui se trouvaient en lui au plus haut degré de précision et de développement. […] En effet, il n’y avait pas dans cet ouvrage que des détails de mœurs à animer, des faits à grouper et à décrire, enfin de la tapisserie historique à nous dérouler avec ses premiers plans et ses perspectives ; il y avait aussi de véritables questions d’histoire à toucher, à pressentir ou à résoudre, d’autant plus difficiles et plus hautes, ces questions, que l’histoire qu’écrivait Daumas n’était pas faite, mais qu’elle se faisait, et qu’il fallait pour récrire la sagacité des historiens contemporains, — les premiers des historiens quand ils sont un peu supérieurs, — qui jugent les événements et leurs résultats dans le coup de la mêlée, tandis que les historiens d’une époque finie les jugent tranquillement après coup. […] À cette raison de tous les temps s’ajoute une raison de circonstance plus haute que l’intérêt de l’auteur et de ses ouvrages, plus haute que l’intérêt de curiosité que nous inspire l’Algérie, et cette raison, c’est l’armée de Sébastopol qui nous la fournit. […] Quand, par exemple, nous lisons sa Grande Kabylie, qui est l’histoire pied à pied de la plus rude de nos conquêtes, nous comprenons parfaitement les résultats que devait donner cette magnifique gymnastique en permanence pendant vingt-cinq ans, cette lutte acharnée contre un peuple qui avait, au plus haut degré, toutes les énergies de la résistance ! […] Or, pour nous, avec le Sacerdoce, l’Armée est la plus haute et la plus profonde moralité du pays.

34. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XII, les sept chefs devant Thèbes. »

Ces sacrifices humains étaient fréquents en temps de siège, à ces hautes époques. […] Sa vue s’étend de ce haut sommet sur les tentes et sur les mouvements de l’ennemi. […] Cependant c’est l’épouvante seule qui inspire les vierges de Thèbes, elles ne chantent si haut que parce qu’elles ont peur. […] Les Chefs décrits par Eschyle surgissent presque aussi haut sur l’enceinte de Thèbes, tours vivantes opposées à des tours de pierre. […] Mais du haut de t’échelle bondissaient ses membres épars, comme s’ils avaient été lancés par une fronde.

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