Et, en effet, à dater d’Auguste, selon l’auteur de La Religion romaine, tout tournait au Christianisme, puisque tout tournait à la dévotion : — la religion, qui n’avait guères été jusque-là qu’une formule de droit religieux et une tradition patriotique, la philosophie, et même la rhétorique. […] Gaston Boissier ne voit pas tout à fait cette croix comme nous la voyons, nous… Pour lui, elle n’est guères qu’un agrément assez touchant dans l’histoire du Christianisme ; mais, selon lui, le Christianisme précédait cette croix dans l’humanité, et aurait pu, sous quelque nom que ce fût, exister.
Certes, la longue chaîne du mysticisme a bien des anneaux ; mais depuis le Fakir de l’Inde livré aux voluptés et aux martyres de l’extase jusqu’à ces Illuminés des voies intérieures dont parle Saint-Martin, en parlant de lui-même, tous les mystiques ne sont guères, en fin de compte, que les victimes plus ou moins foudroyées du sentiment religieux, trop fort pour l’homme, quand il se confie sans réserve à sa chétive et traître personnalité. […] Saint-Martin n’en a guère nulle part… Le Mysticisme, qui est de tout temps, comme l’orgueil de l’homme, sa personnalité et sa soif d’infini, a changé de peau comme un serpent.