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608. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre III. Le théâtre est l’Église du diable » pp. 113-135

Est-ce que jamais la comédie a pu remplacer la philosophie et la sagesse, c’est-à-dire la gloire et la liberté ? […] Le Malade imaginaire est complètement un imbécile, sans une ombre de goût et d’esprit, en dehors de sa maladie ; le Bourgeois gentilhomme, autre victime : on ne lui laisse pas même assez de bon sens pour se conduire, au-delà de sa passion d’être et de paraître. — Tout ou rien, voilà la comédie ; ou la honte absolue, ou la gloire sans tache ! […] L’Impromptu de Versailles. — La Troupe de Molière Quand Molière improvisa L’Impromptu de Versailles, il était arrivé au plus haut degré sinon de sa gloire, au moins de sa faveur. […] — C’est Molière lui-même qui éveille sa troupe, car en ce temps-là il était comédien, il était directeur de comédiens, il était poète,-il était courtisan, il était amoureux, il était jaloux, il aimait sa gloire comme il aimait sa femme. […] Il est vrai de dire que ce danger est assez rare. — « Il y en a beaucoup que le trop d’esprit gâte, qui voient mal les choses à force de lumière, et qui même seraient bien fâchés d’être de l’avis des autres pour avoir la gloire de décider. » Ces gens-là, si l’opinion publique s’exprime avant qu’ils n’aient parlé, s’écrient à l’attentat !

609. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’avenir du naturalisme »

Sa gloire véritable est là. […] D’avoir battu en brèche, sans relâche, avec une énergie extraordinaire, dans sa critique et dans son œuvre, le vieux spiritualisme ; de s’être insurgé contre le meurtrier dualisme chrétien de l’âme et du corps, d’avoir brutalement revendiqué la vie de la terre et de la matière, réentendu la nature et l’instinct, voilà ce qu’il est impossible de lui contester, et ce qui suffirait à légitimer sa gloire. […] Je crois qu’Emile Zola pourrait méditer longuement et avec profit ces quelques lignes du poète américain Walt Whitman, cette vérité des vérités dont la révélation suffirait à la gloire d’un homme : En acceptant joyeusement de marcher sous la conduite de la science moderne, je n’en reconnais pas moins un fait supérieur à tous les faits quelle peut mettre en lumière. […] Pour moi le monde religieux, divin, idéal, quoique latent uniquement dans l’humanité, a une existence aussi réelle que la chimie ou tout autre ordre de phénomènes ; et la gloire des savants consiste en cela qu’ils ouvrent les voies à une théologie plus splendide, à des chants plus divins que la théologie et les chants du passé15. […] Quand bien même vos plus fortes œuvres, l’Assommoir, Germinal, la Terre, ne parleraient pas assez haut pour votre gloire (ce que je crois inadmissible), votre nom restera toujours synonyme d’une formidable prise de corps avec la réalité, d’une énorme poussée vitale.

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