Jean Reynaud passe en ce moment pour une œuvre très forte. […] Reynaud sont plus vives et plus fortes que ses facultés. […] Si ce singulier traité de philosophie religieuse, qui essaie de renverser tous nos dogmes sans exception, sous l’idée chimérique des transformations éternelles et successives de l’humanité et sous un panthéisme plus fort que l’auteur, et qui le mène et le malmène, si ce traité brillait au moins par une exposition méthodique, nous aurions pu donner le squelette de ce mastodonte de contradictions et d’erreurs : mais M. […] lequel laisse passer fort respectueusement toutes les bourdes, dirait Michel Montaigne, de l’auteur de Terre et Ciel, absolument comme on laisse passer, en se rangeant un peu, les boulets de canon auxquels il est défendu de riposter.
Les éditeurs de Donoso ont publié avec son ouvrage principal, l’Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le socialisme, qui a fixé sa gloire et qui la gardera, beaucoup de discours, d’articles de journaux, de lettres datées de diverses époques, et il en est plusieurs de celle-là où comme tant de ses contemporains, Donoso Cortès, trop fort d’esprit pour n’avoir pas le respect du catholicisme, reculait encore devant la pratique, cet effroi des lâches, sans laquelle il est impossible au penseur le plus fort de se justifier tout son respect. […] Le style d’un homme, lorsque cet homme n’est pas assez fort pour le faire avec sa seule manière de sentir, a ses origines. […] Quoiqu’il ait eu, comme orateur, ses deux à trois moments sublimes, Donoso Cortès, ni dans le journal ni à la tribune, n’a été un de ces voyants à distance, qu’on nous passe le mot, un de ces prophètes de longueur qu’il faut forcément être, si, comme orateur ou comme journaliste, on a la prétention, que je trouve un peu forte, de ne pas mourir.