Madame de Montespan elle-même, malgré le plaisir qu’elle avait trouvé autrefois dans ces conversations, les tourna après en ridicule pour divertir le roi63. » Il était fort naturel sans doute qu’à la cour, où tant d’intrigues étaient toujours en action, soit pour la galanterie ou pour la fortune, on regardât comme oisifs les gens qui faisaient les plaisir de la conversation, et que le roi et madame de Montespan, dans les ébats d’un double adultère, eussent besoin de donner un nom ridicule aux personnes spirituelles de mœurs régulières et décentes. […] Madame de Sévigné en était l’âme : elle était aussi fréquemment chez le duc de La Rochefoucauld et dans une étroite liaison avec madame de La Fayette, Le comte de Brancas réunissait aussi du monde aimable chez lui, malgré cette infirmité de distractions continuelles dont madame de Sévigné cite des exemples fort divertissants, et dont La Bruyère a rassemblé une étonnante collection sous le nom de Menalgue dans ses Caractères. […] Mariée à l’âge de 17 ans avec un homme riche, spirituel et fort répandu ; belle, spirituelle elle-même et bien élevée, sa société fut bientôt recherchée. […] Née vers 1641, nièce de la femme du chancelier Le Tellier, cousine germaine du ministre Louvois, mariée fort jeune à un homme de robe devenu célèbre par des bons mots et des chansons, riche, spirituelle et gracieuse au plus haut degré, alliée et amie de madame de Sévigné, qui était son aînée de quatorze ans, amie de madame Scarron, elle réunit chez elle l’élite du monde poli, durant l’intervalle de 1660 à 1770.
II En effet, ceci, c’est mon métier, c’est de la critique littéraire… Dans ces deux volumes de Prévost-Paradol, intitulés : Essais de littérature et de politique, j’ai cherché vainement le soubassement nécessaire à tout livre de littérature et de critique un peu forte, je veux dire le symbole quelconque — religieux ou philosophique, s’il n’est pas religieux, — sur lequel doivent s’appuyer les œuvres intellectuelles des hommes, et je n’en ai trouvé aucun, même à l’état d’essai. […] Comme tous les hommes qui sont, du reste, plus des rhéteurs que des écrivains, Paradol ne se soucie point du mot nuancé qui exprime la vérité des choses, et il fausse celui qu’il emploie en croyant le rendre plus fort… L’écrivain sincèrement passionné s’y prend de tout autre manière, car il a la mesure de sa passion même, tandis que ceux-là qui travaillent à froid et n’ont rien, comme disait Diderot, sous la mamelle gauche, craignent de manquer leur coup, et le manquent de peur de le manquer. […] III J’ai dit maintenant à peu près tout ce que j’avais à dire sur un homme qu’il m’est impossible de ne pas croire fort au-dessous de la fortune littéraire qu’on lui a faite, mais qui aurait pu la continuer, et même mieux que s’il était fort au-dessus.