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492. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — L'abbé de Lamennais en 1832 »

C’est une aberration intellectuelle qui mène également, et par une pente rapide, à l’indifférence, une autre forme plus spécieuse qu’elle revêt, une autre injure au caractère sérieux et trois fois saint de la Vérité.  […] Le style s’y montre en beaucoup d’endroits ce qu’il sera plus tard ; mais les idées théoriques, trop peu dégagées, ne le soutiennent pas encore ; il y a excès de crudité dans les formes. L’auteur, dès ce temps, n’espère rien que d’un nouveau clergé ; il propose des synodes provinciaux, des conférences fréquentes, de libres communautés entre les prêtres de chaque paroisse, en un mot l’association sous diverses formes et tous les moyens de renaissance. […] La France n’en sera pas l’unique théâtre ; elle s’étendra partout où domine le libéralisme, soit comme doctrine, soit comme sentiment, et sous cette dernière forme il est universel. […] L’imagination de l’abbé de La Mennais est restée ardente jusqu’à quarante ans : il eût aimé s’en laisser conduire dans le choix et la forme de ses écrits.

493. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre IV. Construction de la société future »

On les a déduits rigoureusement d’une définition primordiale ; on déduira d’eux non moins rigoureusement les autres droits du citoyen, les grands traits de la constitution, les, principales lois politiques ou civiles, bref l’ordre, la forme et l’esprit de l’État nouveau. […] Une forme d’esprit si universelle ne peut manquer de leur sembler naturelle ; ils sont comme des gens qui, ne parlant qu’une langue et ayant toujours parlé aisément, ne conçoivent pas qu’on puisse parler une autre langue, ni qu’il y ait auprès d’eux des muets ou des sourds  D’autant plus que la théorie autorise leur préjugé. […] Pour diriger et limiter ses coups, on emploie divers mécanismes, constitution préalable, division des pouvoirs, code, tribunaux, formes légales. […] « Ainsi l’éducation publique, dans des règles prescrites par le gouvernement, et sous des magistrats établis par le souverain, est une des maximes fondamentales du gouvernement populaire ou légitime. » — C’est par elle qu’on forme d’avance le citoyen. « C’est elle446 qui doit donner aux âmes la forme nationale. […] Un enfant, en ouvrant les yeux, doit voir la patrie, et, jusqu’à la mort, ne doit voir qu’elle… On doit l’exercer à ne jamais regarder son individu que dans ses relations avec le corps de l’État. » Telle était la pratique de Sparte et l’unique but du « grand Lycurgue »  « Tous étant égaux par la constitution, ils doivent être élevés ensemble et de la même manière. » — « La loi doit régler la matière, l’ordre et la forme de leurs études. » À tout le moins, ils doivent tous prendre part aux exercices publics, aux courses à cheval, aux jeux de force et d’adresse institués « pour les accoutumer à la règle, à l’égalité, à la fraternité, aux concurrences », pour leur apprendre « à vivre sous les yeux de leurs concitoyens et à désirer l’approbation publique ».

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