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922. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — II. (Fin.) » pp. 198-216

Ne pourrai-je aujourd’hui éveiller ces yeux spirituels et intérieurs, qui sont cachés bien avant au fond de votre âme, les détourner un moment de ces images vagues et changeantes que les sens impriment, et les accoutumer à porter la vue de la vérité toute pure ? […] Dans le Panégyrique de saint Paul tout d’abord, quelle prise de possession du sujet par le fond, par le côté le plus intime et le plus hardi, le plus surnaturel ! […] De ce nombre, je citerai tout un développement moral sur l’inconstance des choses humaines et la bizarrerie de la fortune, qui déjoue à chaque fois toutes les précautions des plus prudents et des plus sages : Si loin que vous puissiez étendre votre prévoyance, jamais vous n’égalerez ses bizarreries : vous penserez vous être muni d’un côté, la disgrâce viendra de l’autre ; vous aurez tout assuré aux environs, l’édifice manquera par le fondement, si le fondement est solide, un coup de foudre viendra d’en haut, qui renversera tout de fond en comble.

923. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — III. (Fin.) » pp. 479-496

C’est ainsi qu’en se dirigeant vers le Marboré, après avoir traversé d’affreuses solitudes, et en arrivant à Gavarnie, d’où se découvre presque en entier le grand cirque du fond, au mur demi-circulaire, avec ses rochers à figure de tours, avec ses neiges aux flancs et ses cascades, il dira de cette belle masse, qui est la partie la plus connue du Marboré : Son volume et sa hauteur la feraient croire très voisine de Gavarnie ; mais sa couleur, qui tient de l’azur des hautes régions de l’atmosphère et de l’or de la lumière répandue sur les objets distants, avertit qu’on aura plus d’un vallon à parcourir avant de l’atteindre. Tableau magnifique encadré par les montagnes plus voisines, il contraste avec elles autant pour la teinte que pour la forme, et semble être un fond de décoration, coloré par un pinceau plus brillant, plus léger, plus magique. […] Nous donnant le dernier mot de sa fatigue et de sa sensibilité lassée, il dit dans une de ses lettres, du 28 décembre 1826, c’est-à-dire moins de cinq mois avant sa mort : Maintenant je suis vieux ; je me repose, élève mon fils, et cultive mon jardin au fond de ma petite campagne, où je vis très retiré depuis que je suis délivré des affaires, qui pendant seize ans m’ont détourné, malgré moi, de mes études chéries, et que me voilà rendu au repos dont ma vieillesse a besoin.

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