Un jour, le père le prit par la main, et le conduisit au chef de son atelier auquel il dit : « Je t’amène mon fils ; tu lui feras carder la laine comme un simple ouvrier, et, s’il ne travaille pas comme il faut, voici un fouet avec lequel tu le châtieras. » On dit que depuis ce moment l’enfant ne se plaignit plus du travail du collège. […] Aussi le père de Jean-Bon s’opposa-t-il au désir de son fils ; mais celui-ci, doué d’une grande volonté, persévéra dans son projet, et, après avoir mis sa mère dans le secret, il partit, laissant sur le bureau de son père une lettre dans laquelle il lui ouvrait son cœur et lui expliquait ses sentiments. […] On raconte que dans les premiers mois où il siégeait à la Convention, Jean-Bon, au milieu de tous les soins et soucis que lui donnait la chose publique, trouvait encore le temps de diriger de loin l’instruction du fils de sa sœur, le jeune Belluc30, et que chaque courrier apportait à l’enfant ses devoirs corrigés.
Le Play est d’une génération toute nouvelle ; il est l’homme de la société moderne par excellence, nourri de sa vie, élevé dans son progrès, dans ses sciences et dans leurs applications, de la lignée des fils de Monge et de Berthollet ; et, s’il a conçu la pensée d’une réforme, ce n’est qu’à la suite de l’expérience et en combinant les voies et moyens qu’il propose avec toutes les forces vives de la civilisation actuelle, sans prétendre en étouffer ni en refouler le développement. […] Il estime que, cette liberté lui étant donnée, le père de famille, dans la plupart des cas, choisira pour son associé, pour son continuateur après lui, le plus capable de ses fils : les autres enfants auraient des dots pour s’établir au dehors, ou on leur constituerait des pécules, s’ils consentaient à rester au foyer et dans la dépendance de la famille-mère, de la famille-souche : c’est de ce nom qu’il la désigne. […] Le Play nous parle d’une société déjà rassurée et en voie de stabilité, où il y aurait des points fixes dans les mœurs, de puissantes familles donnant le ton et faisant contre-poids aux corrompus ou aux brouillons par une série d’honnêtes gens de père en fils.