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47. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre VIII. De la clarté et des termes techniques »

Chapitre VIII De la clarté et des termes techniques On peut nommer chaque chose par le terme qui lui convient exactement, garder d’un bout à l’autre du discours la plus rigoureuse propriété d’expression : cela ne fera pas nécessairement qu’on soit compris. […] Si votre lecteur ignore le sens du mot dont vous vous servez, si ce mot n’évoque pas en autrui l’idée qui pour vous lui tient par un rapport nécessaire et universel, la propriété de votre expression ne lui donne pas la clarté, et dans ce cas, trop de justesse nuit : on se fait mieux entendre en parlant improprement, Ovide exilé parmi les Scythes disait : « C’est moi qui suis le barbare ici, puisque je ne me fais pas comprendre. » La plus belle harangue en beau langage latin ne valait pas alors pour lui trois mots de jargon scythe tant bien que mal assemblés, plus ou moins écorchés. […] Là, il n’y a pas de propriété qui tienne : comme il faut être compris avant tout, l’expression ne peut être choisie que parmi les mots connus et compris du public auquel on s’adresse. […] Si la propriété du langage est si fortement recommandée, c’est que par définition, et généralement, le mot propre est celui qui montre le mieux l’objet : là où il cesse de faire son office, où même il voile l’objet qu’il devrait montrer, au nom de cette même loi de propriété, il doit être repoussé : il cesse d’être, dans la circonstance, l’expression vraiment propre de l’objet. […] Il le fera souvent avec bonheur et avec succès, s’il a soin de le faire discrètement et adroitement, et de ne pas abasourdir le lecteur sous une avalanche de mots baroques et incompris, d’encadrer le terme spécial entre des expressions vulgaires, qui l’enserrent et en expriment pour ainsi dire le contenu, de le déterminer si bien par cet entourage que le sens en jaillisse aussitôt, et qu’il ait la clarté d’un mot vulgaire.

48. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 10, continuation des preuves qui montrent que les anciens écrivoient en notes la déclamation » pp. 154-173

Les sentimens, l’expression, la modulation, tout y respire le deüil. […] Ce chant en étoit toujours plus grave, mais il en avoit moins de beauté et moins d’expression. […] Une déclamation où l’on veut mettre trop d’expression, doit tomber dans les deux vices opposez. […] Le goût a bien changé depuis, et la progression de nos chants est devenuë si accelerée, qu’ils sont quelquefois et sans agrément et sans expression. […] En effet, des airs caracterisez, sont susceptibles de toutes sortes d’expressions de joïe et de douleur, d’amour et d’emportemens furieux, comme les autres airs.

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