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1235. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. de Fontanes »

Fontanes avait adroitement emprunté et prodigué les formes sacramentelles du jour : « Une grande Commune a mérité l’indignation nationale : mais qu’avec l’aveu de ses égarements vous parvienne aussi l’expression de ses douleurs et de son repentir ! […] L’Art poétique de Boileau, bien autrement poétique par l’exécution que par les préceptes ; les préceptes et la pratique courante de Voltaire, à force de soumettre la poésie à la même raison que la prose et au pur bon sens, allaient à remplacer l’inspiration et l’expression poétique par ce qui n’en doit être que la garantie et la limite. […] L’expression en poésie doit être incessamment produite par l’idée actuelle, soumise à l’harmonie de l’ensemble, par le sentiment ému, s’animant, au besoin, de l’image, du son, du mouvement, s’aidant de l’abstrait même, de tout ce qui lui va, se créant, en un mot, à tout instant sa forme propre et vive, ce que ne fait pas la pure raison. […] Une célébrité plus active, l’influence politique surtout, et l’expression métaphysique, le révoltaient chez une femme, et lui paraissaient tellement sortir du sexe, qu’à lui-même il lui arriva, cette fois, de l’oublier. […] Rousseau : « Il n’y a pas là ce qu’on « appelle proprement harmonie imitative  ; mais il existe un rapport très-sensible entre le choix des expressions et le caractère de l’image. » On confond un peu tout cela maintenant.

1236. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Mémoires »

Jamais intérieur en apparence insignifiant n’a pris plus de vie sous un pinceau et une expression plus pénétrante. […] Enfant (et je me sers à dessein d’expressions ravies), tout devient passion en attendant la passion même ; tout s’épuise, tout se dévore, avant d’être cueilli et touché. […] Puis voilà qu’on en est à la fuite des ans ; la jeunesse alors (et c’est toujours avec les expressions dérobées au poëte, avec la plume échappée au cygne, que j’écris de lui), la jeunesse rentre au cœur, et quittant l’écorce, les dehors déjà moins fleuris, elle s’enferme en un sein orageux qu’elle continue de troubler.

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