Nos Académies gardent à ce sujet un profond silence, d’autant que j’ai mis au jour leur erreur si étrange au sujet de l’aplatissement de la terre aux pôles qu’ils ont conclu de ce qui prouve son allongement, je veux dire de la grandeur même des degrés polaires. […] a mis le premier cette erreur en avant. […] Mais la preuve que j’ai raison, c’est qu’ils n’ont osé me contredire dans la démonstration géométrique et évidente que j’ai donnée de l’erreur qu’ils professent depuis si longtemps sur la foi d’autrui.
Quand il s’agit d’être juste envers le génie, je ne le serai pas à demi : je ne craindrai pas de heurter des erreurs qui ont acquis du crédit à force d’avoir été répétées. […] La première de ces erreurs et la plus spécieuse, sur laquelle s’appuient d’abord ceux qui veulent déprécier Racine, c’est qu’il a été créé par Corneille. […] C’est qu’on ne veut point revenir sur ses pas ; qu’on tient à ses erreurs par amour-propre ; qu’après avoir décidé qu’un auteur a seul atteint les bornes de son art, il en coûte d’avouer qu’un autre les a reculées bien plus loin ; que c’est bien assez d’avoir un grand homme à admirer, et qu’il paraît un peu pénible d’en admirer encore un autre sur lequel on n’a pas compté ; qu’en général dans tous les arts on adopte d’abord un maître, à qui l’on veut bien prodiguer toutes les louanges, pourvu qu’on soit dispensé d’en accorder aucune à tous les autres : c’est qu’il est beaucoup de juges de certains traits de force et de grandeur, et qu’il en est peu de la perfection ; que les beautés étincellent davantage dans une multitude de défauts, sont plus vivement senties et plus aisément pardonnées ; au lieu que la perfection continue, procurant un plaisir égal, paraît naturelle et simple, charme sans étonner, et a pour ennemis secrets ceux qui, pouvant l’apprécier mieux que les autres, ont plus d’intérêt à la rabaisser.