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696. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

On voit successivement s’ouvrir une fenêtre, puis une autre, comme pour entendre ces bruits et pour respirer cet air matinal embaumé par la nuit ; on aperçoit, entre les rideaux blancs des fenêtres flottant au souffle des bois, quelques charmantes têtes de jeunes filles, ou de beaux enfants qui regardent les pigeons fuyards ou les hirondelles voleter autour des corniches, dans les rayons transparents du jour. […] C’est sa gloire que vous voulez, ce n’est pas la vôtre ; mais il y aura toujours assez d’âmes mystiques autour du sanctuaire où vous chantez vos mélancolies et vos adorations pour les entendre à travers les murs, et pour les retenir dans leur mémoire comme des brises de l’âme, exhalant solitairement à l’oreille de Dieu les mélodies sans paroles de la création. […] dis-je à Laprade, on brûle du désir de vous entendre sous ces mêmes chênes ; ils ont inspiré tant de vers que leurs échos, s’ils pouvaient parler, parleraient en strophes et murmureraient en rythmes. […] Les chênes de ce bouquet d’arbres de Saint-Point ne s’étonneront pas d’entendre les bénédictions d’un étranger sur leur tête et sur leurs racines. » Comme pour lui répondre, les arbres frémirent par hasard d’un coup de vent du midi qui passait sur leurs feuilles. […] Un murmure éclata sous ses ombres paisibles ; J’entendis des sanglots et des bruits menaçants ; Je vis errer des bois les hôtes invisibles, Pour te défendre, hélas !

697. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juillet 1886. »

Une musique nouvelle deviendra nécessaire, écrite, non jouée, suggérant l’émotion sans l’intermédiaire de sons entendus, la suggérant ainsi meilleure et plus intime. […] Alors le chant s’élève : les harmonies sont tenues dans un registre solennel et hautain : entendez la plainte divine : Quia eduxi te terra Ægypti ! […] Le matelot chanteur continue à faire entendre, du haut de son mat, sa chanson nostalgique. […] On entend dans les profondeurs de la forêt des fanfares de chasse d’une sonorité grouillante et lointaine impossible à décrire. […] Tout le frissonnement, tout le bouillonnement des joies et des souffrances endurées s’émeut dans l’orchestre, où tourbillonne éperdument l’essaim des mélodies entendues depuis le premier acte.

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