Dans cette fumée jaunâtre, les objets semblent des fantômes effacés ; la nature a l’air d’une mauvaise ébauche au fusain sur laquelle un enfant a maladroitement passé la manche. […] Il se résignera aisément à écouter quinze discours de suite sur le même sujet, à demander vingt ans de suite la même réforme, à compulser des statistiques, à étudier des traités moraux, à faire des classes le dimanche, à élever une douzaine d’enfants. […] Cela est encore plus visible dans les femmes du peuple ; beaucoup sont amaigries, étiques, les yeux caves, le nez effilé, la peau rayée de marbrures rouges ; elles ont trop pâti, elles ont eu trop d’enfants, elles ont l’air éteint, ou opprimé, ou soumis, ou stoïquement impassible ; on sent qu’elles ont supporté beaucoup et qu’elles peuvent supporter encore davantage. […] Leur exacte et minutieuse description des sentiments aboutit toujours à une approbation ou à un blâme ; ils ne sont pas artistes, mais moralistes ; c’est seulement en pays protestant que vous trouverez un roman employé tout entier à décrire les progrès du sentiment moral dans une enfant de douze ans1332. […] Là où un Anglais gagne vingt shillings par semaine et ne peut que vivre, un Hollandais devient riche et laisse ses enfants dans une très-bonne position.
La famille est détruite : ce père, ces enfants sont en face les uns des autres comme des étrangers, des ennemis, et des ennemis qui ne s’estiment pas. […] Les enfants d’Harpagon, détachés de lui par son vice, se jouent de lui. […] Il est naturel que ceux qui ont eu part au bonheur laissent s’approcher les autres de la table : c’est la loi que les enfants aient leur tour après les parents. Molière est impitoyable contre les parents qui veulent faire servir leurs enfants à la satisfaction de leurs idées et de leurs besoins, quand ceux-ci ont l’âge de vivre par et pour eux-mêmes. […] Henriette est raisonnable et joyeuse : c’est une bonne petite bourgeoise, qui sera adorée de son honnête homme de mari et de ses marmots d’enfants.