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691. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IX. Mémoires de Saint-Simon » pp. 213-237

En effet, tout frondeur qu’il soit, tout misanthrope, tout ambitieux, chagrin, dépité, déplacé, non placé, ce qui est bien pis, tout enragé enfin que soit le duc de Saint-Simon, il traite en grand seigneur qui ne peut s’empêcher d’être sensible au grand cette grandeur abhorrée de Louis XIV qu’il exécute. […] Laissons sa capacité scientifique et un esprit qui a beaucoup de rapport, pour la souplesse et le mouvement, et la grâce même, avec l’esprit de Voltaire ; laissons sa vaste littérature et ce qui l’empêcha d’être complètement vil, sa bravoure au feu, ce sens de l’épée, qu’il avait tout comme un héros ; ne voyons que l’homme politique, qui dura si peu, et demandons-nous ce qu’il fût devenu s’il avait duré !

692. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Macaulay »

Mais il est de la nature des esprits très étendus de ne pouvoir conclure, empêchés par le nombre de choses qu’ils voient ; et tel est le seul défaut qu’en cherchant bien on peut trouver à la cuirasse de Macaulay, lequel n’en demeurera pas moins à la tête des critiques de cet âge, qui, tous, sceptiques en plus ou en moins, n’ont pas l’ensemble de ces fortes, saines et brillantes facultés que nous montrent, parce qu’ils nous les montrent presque sans alliage, les Essais littéraires. […] Macaulay a eu le malheur d’être toujours imperturbablement heureux, et ce bonheur, qui est toujours allé en montant comme une Pyramide, l’a empêché d’avoir dans son talent l’accent qui vient des entrailles, l’intonation des plus puissantes mélancolies.

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