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1379. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Littré. »

C’est ainsi que ce philosophe, au cœur doux autant qu’à l’esprit élevé, comprend la tolérance et l’exerce autour de lui. […] Vous en doutez ; écoutez ceci : « Nul plus que lui (Dante) n’a contribué à fixer ce bel idiome, que j’appellerais avec Byron le doux bâtard du latin, si je ne prétendais que l’italien, avec les autres idiomes romans ses frères, l’espagnol et le français, sont, des fils légitimes qui, ayant été livrés pendant leur minorité à la violence des voisins, ont fini par reprendre le rang dû à leur haute origine. […] Littré, homme de science, de méthode, de comparaison, de raison, de vigueur, et même de rigueur ; le premier d’un tempérament doux, sensible, de bonne heure pétri de la pulpe et de la fine fleur de l’antiquité ; le second nourri du pain des forts en tout genre, du suc généreux des doctrines, tout ressort et tout nerf.

1380. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (1re partie) » pp. 397-476

On sait que le Jura est une épaisse muraille de montagnes à pente douce du côté de la France, à pente escarpée du côté de la Suisse. […] Après une matinée passée dans l’atelier de Canova, le Phidias vénitien, on visitait les ateliers de Thorwaldsen, le Michel-Ange du Nord ; on assistait à la création de toiles ou de fresques magiques sous le pinceau de dix écoles de peintres de toutes les nations, presque tous hommes d’un esprit de conversation transcendante (car le pinceau, je ne sais pourquoi, aiguise l’esprit plus qu’aucune autre profession artistique ; c’est peut-être parce que l’intelligence pense pendant que le pinceau, qui se promène de la toile à la palette, repose l’esprit et le rend plus dispos au doux exercice de l’entretien. […] On laisse rêver ceux qui ne connaissent encore ni la vie ni la mort, et qui se font la mort et la vie à l’image de leurs douces ignorances.

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