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1294. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Plein d’un tendre amour pour son petit champ, je me représente le doux vieillard assis pendant les feux du jour, à l’ombre ; il écoute « le murmure d’un ruisseau », regarde passer « un laboureur inquiet pour ses moissons, un berger conduisant son troupeau, une nourrice attendrie pour son petit enfant ». Le soleil couché, il se promène à petits pas, sans regarder l’or et la pourpre du ciel éblouissant, cherchant « une lumière douce pour soulager ses faibles yeux ». […] S’il est aisé d’apercevoir dans une grande littérature l’empreinte du siècle et de la race qui l’ont produite ; s’il est aisé d’entendre la guerre civile s’entrechoquer dans les vers heurtés de Dante, et de contempler dans la douce figure de Béatrix la personnification, de toutes les choses rêvées par cette époque ardente, et mystique de poètes théologiens ; s’il est aisé de suivre dans le théâtre de Voltaire les préoccupations philosophiques du dix-huitième siècle, et de voir dans le Faust de Goethe l’expression du génie métaphysique et profond de l’Allemagne ; croit-on qu’il soit beaucoup plus difficile de découvrir la cause naturelle d’où procèdent les prodiges apparents, les études calmes d’un Bernardin de Saint-Pierre en 1789, les tragédies attiques d’un Goethe à Weimar ? […] Jean-Paul était un gros homme à la face pleine et douce, « bon diable et le plus excellent cœur du monde401 », qualem non candidiorem terra tulit 402, qui, pour composer ses ouvrages, s’enfonçait dans la campagne avec son chien, les poches munies de deux bouteilles de vin rouge. […] Voilà ce que j’aurais la force de faire, et j’invite les Allemands qui lisent Molière ou qui en parlent, surtout ceux qui en parlent, à descendre à leur tour des régions crépusculaires de l’infini, pour entrer avec moi non dans un pays de plate prose, comme ils le disent sans politesse, mais dans un pays d’ordre et de lumière, aux perspectives bien ménagées, aux formes bien proportionnées, aux lignes nettes et douces, dans le pays du style et de l’esprit français.

1295. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

Jamais l’humanité n’a été plus mêlée à la nature, ni à une nature plus riche, plus douce et plus belle. […] Mais vous le trouverez, j’en ai la douce confiance. […] Cette douce femme entre avec aisance dans le platonisme éperdu et naïvement subtil de la fille de maître Bernard et elle conçoit le remède qu’il y faut. […] Ce n’est pas tout, mais c’est quelque chose : je voudrais que les doux jeunes gens de « l’Œuvre » en fussent persuadés. […] les douces, les expressives voix que celles de la viole d’amour, de la viole de gambe, de la vielle et du clavecin !

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