Saint-Martin, connu et abordé de la sorte, cesse tout à fait d’être dangereux ; il n’est plus même très imposant, mais il devient presque toujours plus touchant et plus aimable. […] Qu’on se figure le jeune Saint-Martin, âgé de vingt-trois ans, à cette date où il devint l’innocente proie d’une doctrine secrète. […] Il démêlait très finement le naturel et la portée des femmes, et, tout en les estimant à quelques égards meilleurs que l’homme et en les entendant volontiers dans leurs confidences, il les jugeait dangereuses là où elles l’étaient, et ne se laissait point consumer ni absorber : La femme a en elle un foyer d’affection qui la travaille et l’embarrasse ; elle n’est à son aise que lorsque ce foyer-là trouve de l’aliment ; n’importe ensuite ce que deviendra la mesure et la raison. […] » Quand j’ai aimé plus que Dieu quelque chose qui n’était pas Dieu, je suis devenu souffrant et malheureux : quand je suis revenu à aimer Dieu plus que toute autre chose, je me suis senti renaître, et le bonheur n’a pas tardé à revenir en moi.
Si ce régime s’était affermi, il allait le servir, y prendre son rang ; il devenait un homme de gouvernement, et ce rôle d’opposition perpétuelle, qui fit en quelque sorte partie de son caractère, n’était plus le sien. […] Mais, après tout, ce prétexte, qui a fourni quelques armes à la jalouse médiocrité, ou plutôt à la mauvaise foi, pour les cas où il s’agit de la France et de ses intérêts secrets, devient ici sans application possible, puisqu’il est question d’une organisation étrangère. […] Ouvrez la brochure des Réactions politiques (1797), on y voit « une tendance de l’esprit humain à englober dans ses regrets tout ce qui entourait ce qu’il regrette » ; on y voit « un mouvement rétrograde qui, se prolongeant au-delà de ses bornes nécessaires, ne laisse enfin pour vestige du changement qu’on voulut opérer, que des débris, des larmes, de l’opprobre et du sang. » Depuis lors, la langue de Benjamin Constant se rompit et se brisa ; elle devint facile, et parut encore plus élégante qu’elle ne l’était. […] D’ordinaire un journal est plus mauvais que son auteur ; et d’ordinaire encore un auteur devient plus mauvais par son journal.