(2) Sans doute, quand on envisage l’ensemble complet des travaux de tout genre de l’espèce humaine, on doit concevoir l’étude de la nature comme destinée à fournir la véritable base rationnelle de l’action de l’homme sur la nature, puisque la connaissance des lois des phénomènes, dont le résultat constant est de nous les faire prévoir, peut seule évidemment nous conduire, dans la vie active, à les modifier à notre avantage les uns par les autres. […] Elle me semble, en effet, exiger préalablement un travail très important et d’une nature toute particulière, qui n’a pas encore été fait, celui de former, d’après les théories scientifiques proprement dites, les conceptions spéciales destinées à servir de bases directes aux procédés généraux de la pratique. […] La philosophie des sciences fondamentales, présentant un système de conceptions positives sur tous nos ordres de connaissances réelles, suffit, par cela même, pour constituer cette philosophie première que cherchait Bacon, et qui, étant destinée à servir désormais de base permanente à toutes les spéculations humaines, doit être soigneusement réduite à la plus simple expression possible. […] Je la crois tellement indispensable, que je regarde l’enseignement scientifique comme incapable de réaliser les résultats généraux les plus essentiels qu’il est destiné à produire dans la société pour la rénovation du système intellectuel, si les diverses branches principales de la philosophie naturelle ne sont pas étudiées dans l’ordre convenable.
Il lui est accordé d’avoir des enfants jusqu’à un âge où évidemment il ne peut plus espérer de les voir en état de se faire leur propre destinée. […] Cette vie, je le sais, n’accomplit pas toutes les destinées de l’homme ; et la société, qui lui est si nécessaire, ne lui suffit point encore : il lui faut la certitude d’un avenir au-delà de ce monde. Mais nous devons rester dans la série d’idées qui nous occupe en ce moment : il nous suffit d’affirmer que si l’homme a besoin de la société pour développer en lui l’intelligence et le sentiment moral, il est démontré, par cela même, que la société lui est nécessaire aussi pour ses destinées définitives dans une autre vie. […] Je serais bien tenté de répéter que Dieu n’aurait pas voulu confier les destinées humaines à des chances contingentes : mais lorsqu’on est décidé à tout admettre, même le hasard, rien ne coûte.