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310. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame, secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. »

Que Fléchier fût lent, qu’il n’eût pas beaucoup de vivacité en causant ni de vives saillies, c’est possible, et c’est même certain ; mais que le fin auteur des Grands Jours d’Auvergne eût la conversation plate, je ne défère pas assez au goût de l’abbé Legendre pour lui accorder ce point, et j’aime mieux supposer qu’il a employé un mot impropre en matière si délicate. […] Il eut des affaires fort délicates, une entre autres où il se mit au plus mal avec la Cour et avec le cardinal Mazarin : il subit un temps d’exil dans son diocèse. […] Quelle capacité facile et agréable ; et combien d’affaires, et des plus délicates, dans le grand règne, dont il tient le fil et dont le nœud se dénoue entre ses mains !

311. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite et fin.) »

Nul exemple ne nous prouve mieux que le sien combien la faculté de critique émue, délicate, est une faculté active. […] « Le véritable esprit (ou talent), c’est la nature, — la nature mise à son avantage ; ce qui a été souvent pensé, mais ce qui n’avait jamais été encore exprimé si bien ; quelque chose dont la vérité nous trouve convaincus déjà à première vue, qui nous rend une certaine image que nous avions dans l’esprit. » Il est pour le choix, il n’est pas pour le trop, pas même pour le trop d’esprit ou de talent : « Une œuvre peut pécher par le trop d’esprit, comme le corps peut périr par excès de sang23. » Toutes ces vérités délicates sont rendues chez Pope en vers élégants et en bien moins de mots que je n’en mets ici ; car autant que de Malherbe on peut dire de lui : D’un mot mis en sa place enseigna le pouvoir. […] Gray le mélancolique, le délicat, si original, est trop étranglé ; il n’y a nul rapport entre Gray et Lamartine, pas plus qu’entre une perle et un lac.

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