Cependant sa mère commençait à craindre trop de penchant en elle vers les bonnes carmélites ; elle croyait trouver que ce blond et angélique visage ne s’apprêtait pas à sourire assez au monde brillant qui l’allait juger sur les premiers pas. […] On la voit dans ses conseils près de M. le Prince, à Saint-Maur, tantôt vouloir l’accommodement parce que M. de La Rochefoucauld le désire, tantôt vouloir la rupture parce que la guerre l’éloigne de son mari, « qu’elle n’avoit jamais aimé, dit Retz, mais qu’elle commençoit à craindre. » Et il ajoute : « Cette constitution des esprits auxquels M. le Prince avoit affaire eût embarrassé Sertorius165. » Fâcheux et bizarre augure ! […] Elle appréhende désormais de retrouver l’orgueil en tout, et cette docilité même, qui paraît le seul endroit sain de son âme, lui devient suspecte ; elle craint de n’être docile qu’en apparence, et parce qu’en obéissant on plaît, qu’on regagne par là l’estime qu’on a perdue. […] Lemontey, dans une notice spirituelle, mais sèche et légère, n’a pas craint de l’appeler une âme théâtrale et vaine.
Quant au commun des habitants dont le logis est étroit, mais passable, ils craignent les déménagements, ils tiennent à leurs habitudes. […] Cela fait frémir… » Déjà, dans le monde, le rôle d’un ecclésiastique est difficile ; il semble qu’il y soit un pantin ou un plastron506. « Dès que nous y paraissons, dit l’un d’eux, on nous fait disputer ; on nous fait entreprendre, par exemple, de prouver l’utilité de la prière à un homme qui ne croit pas en Dieu, la nécessité du jeûne à un homme qui a nié toute sa vie l’immortalité de l’âme ; l’entreprise est laborieuse, et les rieurs ne sont pas pour nous. » — Bientôt le scandale prolongé des billets de confession et l’obstination des évêques à ne point souffrir qu’on taxe les biens ecclésiastiques soulèvent l’opinion contre le clergé et, par suite, contre la religion. « Il est à craindre, dit Barbier en 1751, que cela ne finisse sérieusement ; on pourrait voir un jour dans ce pays-ci une révolution pour embrasser la religion protestante507. » — « La haine contre les prêtres, écrit d’Argenson en 1753, va au dernier excès. […] Chacun croyait marcher à la perfection, sans s’embarrasser des obstacles et sans les craindre. […] À ce moment, dit un contemporain547, « la pitié la plus active remplissait les âmes ; ce que craignaient le plus les hommes opulents, c’était de passer pour insensibles ».