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398. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (2e partie) » pp. 1-80

Cette difficulté, qui ne fit alors que m’enflammer de plus en plus, et qui, lorsque ensuite je voulus développer, versifier et imprimer ma tragédie, a toujours été l’aiguillon qui m’excitait à vaincre l’obstacle, l’œuvre achevée, je la crains, cette difficulté, et la reconnais dans toute son étendue, laissant aux autres à juger si j’ai su la surmonter complètement ou en partie, ou si elle demeure tout entière. […] Mais ma joie ne fut pas de longue durée ; les choses allant de mal en pis, et chaque jour, dans cette Babylone, ôtant quelque chose au repos et à la sécurité de la veille, pour augmenter le doute et les sinistres présages qui menaçaient l’avenir, tous ceux qui ont affaire avec ces espèces de singes, et nous sommes malheureusement dans ce cas, mon amie et moi, doivent passer leur vie à craindre un dénouement qui ne peut tourner à bien. […] La veuve de Charles-Édouard, offrant publiquement ses hommages au représentant couronné de cette maison de Hanovre qui avait été, en 1746, si impitoyable pour les amis du prétendant, c’est là un contraste qui devait exciter un immense étonnement. » Deux sœurs, dont l’une fut aimée par Horace Walpole, mesdemoiselles Berry, avec lesquelles je passais mes soirées à Rome en 1820, avaient reçu de leur correspondant Walpole un document qu’elles ne craignaient pas de communiquer dans leur intimité […] Il fut heureux pour nous que l’avis de ceux qui voulaient nous reconduire à l’hôtel de ville ne prévalût pas ; si on nous voyait arriver ainsi avec deux voitures surchargées, et ramenés en pompe avec ce renom de fugitifs, il y avait beaucoup à craindre pour nous au milieu de cette populace. […] Bien qu’étranger, je devais craindre un traitement pareil ou plus cruel encore, car il était naturel que l’on m’eût signalé aux Français comme un contempteur et un ennemi de leur autorité.

399. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre septième »

Mais en nettoyant le discours de toute affectation, en voulant qu’un écrit fût d’abord la plus honorable des actions, la théorie de la raison rendait les auteurs un peu timides, et leur faisait craindre leur imagination comme une tentation du bel esprit. […] Loin d’imiter l’affectueuse familiarité de paroles où, plus rassuré par l’homme qu’intimidé par le Dieu, Bossuet se laisse aller, Bourdaloue semble craindre de voir l’homme dans le Dieu. […] Il tient les mystères pour établis, les difficultés de la religion pour résolues ; il craint de hérisser son discours de textes sacrés ; s’il cite les Pères, c’est pour ôter au discours l’air mondain plutôt que pour y mettre le nerf de la tradition. […] L’auditoire craignait la théologie contentieuse. […] L’exagération du moraliste dans Massillon n’est pas seulement une sorte de compensation de ce qu’il retranchait au dogme ; je crains d’y voir une habitude de rhéteur.

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