Le fait et le mot perdent vite leur importance ; des déplacements de perspectives sont à craindre ; bien des détails paraissent plus tard disproportionnés ou insignifiants. […] Il suffisait qu’il lui arrivât quelque chose d’heureux pour qu’il craignît une expiation. […] — Non, je ne me rappelle plus. — Je dis ceci… » Et, se reculant, un doigt levé pour solenniser sa parole : « Ô mort, je ne te crains plus.
Il n’a même pas craint de les montrer, à de certaines heures, presque grotesques, presque cocasses et, ce faisant, il nous les a rendus si présents que leur relief est obsédant. […] Il disait donc : « La loi de l’écrivain (entendez ici le romancier), ce qui le fait tel, ce qui, je ne crains pas de le dire, le rend égal, peut-être supérieur à l’homme d’État, c’est une décision quelconque sur des choses humaines, un dévouement absolu à des principes. » Il faut traduire cette formule : Balzac n’a pas écrit un seul roman à thèse. […] Après nous on vivra de l’ombre d’une ombre. » Il concluait, dissimulant, sous un sourire, à son habitude, les anxiétés de ses prévisions : « Je crains par moments que cela ne soit un peu léger. » Renan se trompait.