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620. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

Tout d’un coup, en un mois, après un voyage à la campagne, il se maria441. […] Sans craindre le ridicule, et avec la roideur d’un spéculatif tout d’un coup heurté par la vie réelle, il écrivit des traités en faveur du divorce, les signa de son nom, les dédia au Parlement, se crut divorcé, de fait, puisque sa femme refusait de revenir, de droit, parce qu’il avait pour lui quatre passages de l’Écriture ; là-dessus il fit la cour à une jeune fille, et tout d’un coup, voyant sa femme à ses genoux et pleurante, il lui pardonna, la reprit, recommença son sec et triste mariage, sans se laisser rebuter par l’expérience, au contraire destiné à contracter deux autres unions encore, la dernière avec une femme plus jeune que lui de trente ans. […] C’est un combat corps à corps, où tout mot porte coup, prolongé, obstiné, sans élan, sans faiblesse, d’une inimitié âpre et fixe, où l’on ne songe qu’à blesser fort et à tuer sûrement. […] Déjà, dans celui qui suit, Lycidas, en célébrant, à la façon de Virgile, la mort d’un ami bien-aimé505, il laisse percer les colères et les préoccupations puritaines, invective contre la mauvaise doctrine et la tyrannie des évêques, et parle déjà « du glaive à deux mains qui attend à la porte prêt à frapper un coup pour ne frapper qu’un coup. » Dès son retour d’Italie la controverse et l’action l’emportent ; la prose commence, la poésie s’arrête. […] Les deux partis se taillent à coups d’épée, se jettent par terre à coups de canon, s’assomment de raisonnements politiques525.

621. (1923) L’art du théâtre pp. 5-212

S’il n’a déjà mis dans ses mots les images, les gestes, le mouvement, l’action, la vie que requiert avant tout le drame, ce n’est que par un artifice qu’un autre les y mettra après coup. […] Si le livre ne souffrit pas de ce coup d’état d’une élite, le théâtre tel qu’il se formait ne pouvait, hélas ! […] La théorie n’est la plupart du temps posée que pour justifier après coup la pratique ou le courant secret qui porte en un certain sens les esprits. […] — Enfin, et chez Racine encore, l’analyse la plus subtile conduit toujours le dramaturge à un de ces grands coups de synthèse tragique qui résument le personnage et le dressent vivant devant nous. […] On n’y parviendra pas du premier coup.

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