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1172. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VII. Les poëtes. » pp. 172-231

Vous croiriez être devant une famille naturelle de plantes ; si la grandeur, la couleur, les accessoires, les noms diffèrent, au fond le type ne varie pas ; les étamines sont en nombre pareil, insérées de même, autour de pistils semblables, au-dessus de feuilles ordonnées sur le même plan ; qui connaît l’une connaît les autres ; il y a un organe et une structure commune qui entraîne la communauté du reste. […] Il marque tout dans le vol du faisan, le frou-frou de son essor, « ses teintes lustrées, changeantes, —  sa crête de pourpre, ses yeux cerclés d’écarlate, —  le vert si vif que déploie son plumage luisant, —  ses ailes peintes, sa poitrine où l’or flamboie1121. » Il a la plus riche provision de mots brillants pour peindre les sylphes qui voltigent autour de son héroïne, « lumineux escadrons dont les chuchotements aériens semblent le bruissement des zéphyrs, —  et qui, ouvrant au soleil leurs ailes d’insectes, —  voguent sur la brise ou s’enfoncent dans des nuages d’or ; —  formes transparentes dont la finesse échappe à la vue des mortels, —  corps fluides à demi dissous dans la lumière, —  vêtements éthérés qui flottent abandonnés au vent, —  légers tissus, voiles étincelants, formés des fils de la rosée, —  trempés dans les plus riches teintes du ciel, —  où la lumière se joue en nuances qui se mêlent, —  où chaque rayon jette des couleurs passagères, —  couleurs nouvelles qui changent à chaque mouvement de leurs ailes1122. » Sans doute ce ne sont point là les sylphes de Shakspeare ; mais à côté d’une rose naturelle et vivante, on peut encore voir avec plaisir une fleur en diamants, comme il en sort des mains d’un joaillier, chef-d’œuvre d’art et de patience, dont les facettes font chatoyer la lumière et jettent une pluie d’étincelles sur le feuillage de filigrane qui les soutient.

1173. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

Elle avait une autre figure ; il me sembla qu’elle riait, et ses cachets paraissaient couleur de rose. […] Les habitants commençaient à retirer les drapeaux blancs des fenêtres, et à coudre les trois couleurs dans leurs maisons. […] — Beaucoup de philosophes embrassent sa cause et la plaident, comme des avocats généreux celle d’un client pauvre et délaissé ; leurs écrits et leurs paroles aiment à s’empreindre de ses couleurs et de ses formes, leurs livres aiment à s’orner de ses dorures gothiques, leur travail entier se plaît à faire serpenter, autour de la croix, le labyrinthe habile de leurs arguments ; mais il est rare que cette croix soit à leur côté dans la solitude. — Les hommes de guerre combattent et meurent sans presque se souvenir de Dieu.

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