Et il y a mieux : quand on lit les Mémoires de Richelieu, on s’aperçoit à tout moment qu’au milieu des choses les plus éloignées et les plus anciennes qu’il raconte, il parle tout à coup au temps présent ; il est à croire que, de très bonne heure, il avait pris des notes sur les choses et sur les événements, et ces notes, tantôt vives, tantôt un peu longues, passèrent ensuite à peu près intégralement dans le corps de son ouvrage. […] Affamés d’honneurs et de biens, et sans aucune ambition patriotique, ils accaparent les gouvernements, les charges, les places de guerre et châteaux ; ils achètent et marchandent pour eux les compagnies des corps royaux et d’élite ; les deniers levés sur les peuples sont détournés à ces traités particuliers : « En un mot, dit Richelieu, si la France était tout entière à vendre, ils achèteraient la France de la France même. » Richelieu est dans l’opposition, comme nous dirions : il est trop patriote, à cette heure, pour n’en pas être, mais il en est encore d’une manière qui lui est propre. […] On a un tableau ironique comme en aurait pu tracer un Philippe de Commynes, et il le termine par ces considérations si dignes de lui, de l’homme resté, en tout temps, royal : Je reconnus en cette occasion que tout parti composé de plusieurs corps qui n’ont aucune liaison que celle que leur donne la légèreté de leurs esprits…, n’a pas grande subsistance ; que ce qui ne se maintient que par une autorité précaire n’est pas de grande durée ; que ceux qui combattent contre une puissance légitime sont à demi défaits par leur imagination ; que les pensées qui leur viennent, qu’ils ne sont pas seulement exposés au hasard de perdre la vie par les armes, mais, qui plus est, par les voies de la justice s’ils sont pris, leur représentant des bourreaux au même temps qu’ils affrontent les ennemis, rendent la partie fort inégale, y ayant peu de courages assez serrés pour passer par-dessus ces considérations avec autant de résolution que s’ils ne les connaissaient pas. Tel demeurait Richelieu, quand il se trouvait, à son corps défendant, enveloppé dans la révolte à main armée et dans la sédition. […] Il ne saurait admettre que, dans un État, tout le monde indifféremment soit élevé pour être savant : « Ainsi qu’un corps qui aurait des yeux en toutes ses parties serait monstrueux, dit-il, de même un État le serait-il, si tous ses sujets étaient savants ; on y verrait aussi peu d’obéissance que l’orgueil et la présomption y seraient ordinaires. » Et encore : « Si les lettres étaient profanées à toutes sortes d’esprits, on verrait plus de gens capables de former des doutes que de les résoudre, et beaucoup seraient plus propres à s’opposer aux vérités qu’à les défendre. » Il cite à l’appui de son opinion le cardinal Du Perron, si ami de la belle littérature, lequel aurait voulu voir établir en France un moindre nombre de collèges, à condition qu’ils fussent meilleurs, munis de professeurs excellents, et qu’ils ne se remplissent que de dignes sujets, propres à conserver dans sa pureté le feu du temple.
Ce parti pris est si évident qu’il déconcerte un peu le spectateur moderne, expert en psychologie, friand d’analyses subtiles et peu enclin à croire à l’existence de ces corps simples auxquels, à force de talent et de volonté, Émile Augier réussit à donner la vie. […] Le corps, couvert d’un linceul blanc, un crucifix sur la poitrine, est étendu là sur le lit de mort, un très simple lit de fer. […] À l’issue de ce service, le corps sera transporté à Paris et déposé dans une chapelle à l’église de la Trinité. […] À l’issue de la cérémonie, le corps sera transporté à la Celle-Saint-Cloud, où se trouve un caveau de famille contenant déjà le corps de M.