Le premier pamphlet de Courier est sa Pétition aux deux Chambres, datée du 10 décembre 1816, et commençant en ces termes : « Je suis Tourangeau, j’habite Luynes sur la rive droite de la Loire, lieu autrefois considérable, que la révocation de l’édit de Nantes a réduit à mille habitants, et que l’on va réduire à rien par de nouvelles persécutions, si votre prudence n’y met ordre… » Suit l’exposé des faits, la rencontre de Fouquet à cheval allant au moulin, et du curé avec le mort qu’on mène au cimetière, Fouquet refusant de céder le pas, d’ôter le chapeau, lâchant même un juron au passage, et, pour ce méfait, pris un matin par quatre gendarmes et conduit pieds nus et mains liées entre deux voleurs aux prisons de Langeais ; puis, quelques mois après, l’arrestation de douze personnes dans ce petit endroit de Luynes, toutes enlevées nuitamment et jetées en prison pour propos séditieux ou conduite suspecte. […] Courier, et dont l’un était déjà mort au moment de ce second procès ; il les accusait de l’avoir poussé à l’acte, de l’y avoir conduit et d’avoir fait de lui leur instrument, eux présents sur les lieux et lui forçant la main ; il prétendait prouver qu’ils avaient à cette mort plus d’intérêt que lui.
Je lui ai moi-même entendu raconter que, durant les premières années de son séjour à Paris, il lui était arrivé cent fois de rester plus d’un quart d’heure dans son fiacre avant de parvenir à se décider sur la maison où il devait se faire conduire d’abord. Quand il fut question, plus tard, de conduire le char de l’État sur une pente rapide, et que pas un instant n’était à perdre, on conçoit que ce fond d’indécision dut être fatal : dans l’habitude de la vie, ce n’était qu’une singularité piquante.