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688. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIV. La littérature et la science » pp. 336-362

Les plus savants d’entre eux seraient ravis autant qu’étonnés de voir courant les Revues et même les rues des centaines de mots dont ils ne comprendraient pas le sens : mots désignant tantôt des matières récemment découvertes (gallium, sodium, gaz acétylène, etc.), tantôt des machines créées par l’industrie (locomotives, microphones, cinématographes, etc.), tantôt même des sciences dont ils n’avaient aucune idée (biologie, météorologie, sociologie, que sais-je encore). […] On comprend ces moqueries) quand on entend, cinquante ans après Voltaire, le bon Nodier déclarer que le mot luron vient sans doute de tra deri dera, attendu qu’on dit un joyeux luron et qu’un homme joyeux fredonne volontiers un refrain. […] Elle a compris que son premier devoir est d’être vraie et elle a mis son point d’honneur à devenir exacte jusqu’au scrupule. […] Et bientôt c’est, dans la philologie, l’érudition lourde d’ennui qui sait à merveille corriger un texte, mais non plus en sentir la grandeur ou la grâce ; dans l’histoire, la monographie substantielle et indigeste qu’on estime et ne lit pas ; dans la philosophie, la peur des vastes synthèses et la mise sous scellés de la métaphysique et de ses éternels problèmes ; dans le roman, au théâtre, la décroissance de la verve inventive, la froideur, la sécheresse, la vulgarité du terre à terre, l’impuissance à créer un type supérieur ; en toute matière, le style pesant, épais, scolastique, engrisaillé de termes abstraits ou hérissé de vocables rébarbatifs ; bref, tout ce que comprend d’étroit, de rogue, de fastidieux, de glacé, de mort le mot de pédantisme. […] Guidés par le grand exemple de Lucrèce, nos poètes l’ont compris.

689. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Alfred de Musset » pp. 364-375

On s’était aperçu depuis quelque temps que plus d’un de ces jolis proverbes qui composaient le Spectacle dans un fauteuil pouvait, bien compris et bien rendu par des acteurs et des actrices de société, procurer une heure de très agréable délassement. […] J’ai cru que c’était une amie ; Quand je l’ai comprise et sentie, J’en étais déjà dégoûté. […] … », ce son matinal du cor, et qu’on mette en regard cet admirable et affligeant sonnet final, toute la carrière poétique d’Alfred de Musset m’apparaît comprise entre deux : gloire et pardon !

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