C’est là que l’étrange fille se comprenait tout à fait. […] Tu ne comprends pas ce que je veux dire, tu ne comprendras pas, parce que tu n’as pas éprouvé cela. […] On voit bien que le peintre a compris ce qu’il faisait. […] attristants, mais qui ne comprennent seulement pas le mot ! […] Vous savez que je ne tiens pas à ceux qui ne me comprennent pas ; ceux à qui je tiens me comprennent.
Tandis que la France, encore tout éperdue des secousses de sa Révolution religieuse et politique, s’occupait d’en développer ou d’en restreindre les conséquences, et, avant d’avoir recouvré son sang-froid, tâchait de faire la part des bienfaits et celle des erreurs ; tandis que, saisie d’une enivrante fièvre de combats, elle se précipitait à travers l’Europe et dépensait son surcroît d’énergie par des victoires, la révolution dans l’art se préparait au dedans, peu comprise, inaperçue ou moquée à l’origine, mais réelle, croissante, irrésistible. […] Ce qu’il y avait de démesuré et de vaguement instinctif dans son œuvre d’art empêcha madame de Staël d’être comprise alors et d’être appréciée à sa valeur comme artiste et poète. […] On ne comprit pas les Martyrs, on n’aurait pas compris alors l’Aveugle d’André Chénier. […] Ballanche, le jeune homme, qui, plein de nobles et de sincères affections, repousse d’abord le temps présent, comme incomplet et aride, qui résiste aux destinées sociales encore incertaines, et se réfugie de désespoir dans un passé chimérique ; ce jeune homme, type fidèle de bien des âmes tendres de notre âge, finit par se réconcilier avec cette société nouvelle mieux comprise, et par reconnaître, à la voix du vieillard initiateur, c’est-à-dire à la voix de la philosophie et de l’expérience, que nous sommes dans une ère de crise et de renouvellement, que ce présent qui le choque, c’est une démolition qui s’achève, une ruine qui devient plus ruine encore ; que le passé finit de mourir, et que cette harmonie qu’il regrette dans les idées et dans les choses ne peut se retrouver qu’en avançant. […] L’art se souvient du passé qu’il a aimé, qu’il a compris, et dont il s’est détaché avec larmes ; mais c’est vers l’avenir que tendent désormais ses vœux et ses efforts ; sûr de lui-même, intelligent du passé, il est armé et muni au complet pour son lointain pèlerinage.