Et, d’autre part, nous avions assurément éprouvé cet obscur frisson avant d’avoir ouvert un livre russe ou norvégien. « Le silence éternel de ces espaces infinis m’effraie », est une phrase qui ne date pas d’hier Un des passages de Tolstoï où l’inquiétude du mystère est le mieux traduite, c’est apparemment quand le prince André Volkonsky, blessé à Austerlitz, est étendu sur le champ de bataille et regarde le ciel, « ce ciel lointain, élevé, éternel ».
Il est, le Malade, immobile en son siège, prostré, tandis que flue autour de lui un peuple de fidèles ; il demeure, et son corps en arrière est penché, ses mains à ses côtés pendent, sa tête est renversée, et sa face, face à face au ciel de la coupole, a des yeux fixes dans le haut de l’air ; et ses lèvres, entrécartées par une haleine faible, gardent cette torpidité rigide des affaissements… En les vastes nefs grouille la foule humaine… Volez, bruits des prières, ailes des confessions pieuses ! […] ouvre-toi, triste ciel, que le rite se réinstitue de l’éternel Sacrifice !