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384. (1892) Boileau « Chapitre IV. La critique de Boileau (Suite). Les théories de l’« Art poétique » » pp. 89-120

ou bien, s’il admettait une tragédie chrétienne, pourquoi pas aussi une épopée chrétienne ? […] Il ne connaît pas d’épopée chrétienne qui soit passable : même dans le Tasse, il trouve bien du clinquant. […] Mais comme il serait difficile à un moderne, à un chrétien, de maintenir cette assertion au sens littéral du mot, Boileau recourt pour la justifier à une conception très fausse et très en vogue alors de l’épopée : l’épopée est un poème allégorique, et la mythologie est vraie, comme forme d’art exprimant l’abstrait par le concret, selon de certaines conventions. […] Il a voulu garder la mythologie, à laquelle une nation chrétienne ne pouvait pas croire, il a voulu garder l’épopée, qu’un siècle de civilisation raffinée et de raison mûrie ne pouvait pas refaire ; et pour assurer une existence artificielle à ces choses si particulièrement attachées aux mœurs et à l’esprit des temps antiques, il a dû les dénaturer et leur attribuer une valeur fictive et toute de convention, selon les préjugés les plus étroits du goût contemporain.

385. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

ou sa vanité le détournait-elle d’en parler, si cette mère était d’origine juive, d’une famille portugaise de nouveaux chrétiens ? […] Cette morale est tout juste l’antithèse de la morale chrétienne : elle exclut, par essence, l’abnégation, le sacrifice, la charité. […] En religion, il sera bon catholique, lui de qui l’âme est si peu chrétienne : c’est qu’il faut suivre aussi la religion de son prince et de son pays. […] Surtout il n’est pas chrétien, et la décence de son adhésion à la religion établie dissimule mal en lui la négation de l’essence même du christianisme : ainsi le courant d’esprit antichrétien, ou simplement non chrétien, qui se laisse distinguer dans le siècle classique, et qui passe par Molière ou par Descartes pour arriver à Voltaire, prend sa source en lui ; le rationalisme, épicurien ou cartésien, est impliqué dans les Essais.

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