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419. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre III. De la survivance des images. La mémoire et l’esprit »

Placé entre la matière qui influe sur lui et la matière sur laquelle il influe, mon corps est un centre d’action, le lieu où les impressions reçues choisissent intelligemment leur voie pour se transformer en mouvements accomplis ; il représente donc bien l’état actuel de mon devenir, ce qui, dans ma durée, est en voie de formation. […] Cela revient à dire qu’entre deux idées quelconques, choisies au hasard, il y a toujours ressemblance et toujours, si l’on veut, contiguïté, de sorte qu’en découvrant un rapport de contiguïté ou de ressemblance entre deux représentations qui se succèdent, on n’explique pas du tout pourquoi l’une évoque l’autre. […] Dans la première hypothèse (qui n’a guère pour elle que son apparente simplicité et son analogie avec un atomisme mal compris), chaque souvenir constitue un être indépendant et figé, dont on ne peut dire ni pourquoi il vise à s’en agréger d’autres, ni comment il choisit, pour se les associer en vertu d’une contiguïté ou d’une ressemblance, entre mille souvenirs qui auraient des droits égaux. […] D’ailleurs, une fois le souvenir relié à la perception, une multitude d’événements contigus au souvenir se rattacheraient du même coup à la perception, — multitude indéfinie, qui ne se limiterait qu’au point où l’on choisirait de l’arrêter. […] Nous savons, par exemple, quand nous lisons un roman d’analyse, que certaines associations d’idées qu’on nous dépeint sont vraies, qu’elles ont pu être vécues ; d’autres nous choquent ou ne nous donnent pas l’impression du réel, parce que nous y sentons l’effet d’un rapprochement mécanique entre des étages différents de l’esprit, comme si l’auteur n’avait pas su se tenir sur le plan qu’il avait choisi de la vie mentale.

420. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

Nous choisîmes donc cette occasion de l’effacement de M.  […] Voici les détails du livre : Mahaud chevauche, s’éloignant de la demeure familiale au côté de Jacques de Horps qu’elle a choisi. […] Lui aussi cherchait à s’évader, il n’osa toucher au vers et choisit le poème en prose ; s’il eût vécu, peut-être eût-il élargi ses tendances de liberté. […] Il a choisi Bruges, non tant le Bruges réel qu’un Bruges-Musée qui est à lui et qu’il développe. […] La mort c’est avoir choisi.

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