Et alors vous auriez précisément ce que je viens de vous indiquer, un conte symbolique où Psyché serait présentée comme l’être humain qui cherche sans cesse à anatomiser ses passions et ses sentiments, et qui, à ce jeu terrible, finit par les mortifier, comme on disait si bien au dix-huitième siècle, et par les ruiner. […] Si vous trouvez que je sois démon, vous me haïrez ; et si je suis dieu, vous cesserez de m’aimer, ou, du moins, vous ne m’aimerez plus avec tant d’ardeur ; car il s’en faut bien qu’on aime les dieux aussi violemment que les hommes… » C’est infiniment charmant, et, comme vous le voyez, infiniment gracieux, comme étant superficiel en apparence, et très profond quand on y réfléchit.
Elle est mémoire, mais non pas mémoire personnelle, extérieure à ce qu’elle retient, distincte d’un passé dont elle assurerait la conservation ; c’est une mémoire intérieure au changement lui-même, mémoire qui prolonge l’avant dans l’après et les empêche d’être de purs instantanés apparaissant et disparaissant dans un présent qui renaîtrait sans cesse. […] Prenons donc cette durée pour ce qu’elle est, pour une négation, pour un empêchement sans cesse reculé de tout voir : nos actes eux-mêmes ne nous apparaîtront plus comme un apport de nouveauté imprévisible.