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32. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre IX. La pensée est-elle un mouvement ? »

Or, si l’on en croit aujourd’hui les physiciens, cette cause extérieure des phénomènes lumineux, ce quelque chose qui subsiste dans l’absence de tout sujet sentant et de toute sensation actuelle, serait un mouvement vibratoire d’un milieu élastique conjectural appelé éther. […] Une certaine cause externe, dont la nature échappe à nos sens, produit sur nos organes un certain effet que l’on appelle la sensation de chaleur, et par suite on a donné le nom de chaleur à la cause qui produit cet effet ; mais cette cause est très-différente de la sensation qu’elle produit. Le feu n’a pas chaud, la glace n’a pas froid ; on dit que l’un est chaud et que l’autre est froide, parce qu’ils sont l’un et l’autre cause de ces deux sensations contraires. […] En un mot, une même cause peut, selon les circonstances, produire tantôt la sensation de chaleur sur un sujet sentant, tantôt un phénomène de mouvement dans un corps qui ne sent pas. Tout ce qui résulterait de là, ce serait donc qu’une même cause peut produire sur deux substances différentes deux effets différents, mais non pas que cette cause puisse se transformer en autre chose qu’elle-même et devenir ce qu’elle ne serait pas.

33. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre III. De l’organisation des états de conscience. La liberté »

Mais cette relation, qui explique le passage, en est-elle la cause ? […] Que conclure de là, sinon que cette idée commune dérive d’une cause inconnue — peut-être de quelque influence physique — et que, pour légitimer son apparition, elle a suscité une série d’antécédents qui l’expliquent, qui en paraissent être la cause, et qui en sont pourtant l’effet ? […] Dire que les mêmes causes internes produisent les mêmes effets, c’est supposer que la même cause peut se présenter à plusieurs reprises sur le théâtre de la conscience. […] Pour le physicien, la même cause produit toujours le même effet ; pour un psychologue qui ne se laisse point égarer par d’apparentes analogies, une cause interne profonde donne son effet une fois, et ne le produira jamais plus. […] Si donc on se décide à concevoir sous cette seconde forme la relation causale, on peut affirmer a priori qu’il n’y aura plus entre la cause et l’effet un rapport de détermination nécessaire, car l’effet ne sera plus donné dans la cause.

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