« La nuit de notre exil, dit-elle, peut avoir des ombres, mais elle n’a point de ténèbres. » Elle excelle à ces nuances incroyables, à cet art d’opposer entre eux les mots les plus voisins parle sens, de manière à multiplier la pensée en la divisant, et à faire croire peut-être à plus de choses possibles qu’il n’y en a ; c’est ainsi qu’ailleurs elle dira, en jouant sur ces mots unisson, union, unité : « Il n’y a rien de si attractif pour les belles âmes qu’une belle âme ; et quand cette harmonie qui se devine existe, il faut peu de chose pour que, partant de l’unisson, on arrive à prétendre à l’unité.
J’avais dit, le jour où j’eus l’honneur de succéder à Delavigne pour le fauteuil académique, que je regrettais, dans ses drames, qu’au lieu d’aller de concessions en concessions du côté du romantisme sans y atteindre jamais, le poète ne fût pas resté plus franchement ce qu’il était par nature et par goût, — classique : et quand j’exprimais publiquement ce regret ce n’était pas du tout que moi-même je fusse devenu classique, ni que je me fusse converti (comme Rigault le prétendait en me raillant agréablement) ; mais j’aime ce qui a un caractère, j’aime l’originalité et l’individualité dans la poésie et dans l’art, cette individualité ne fût-elle pas précisément la mienne ni celle de mes amis.