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1448. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — I. » pp. 301-321

Au sortir de l’École centrale où, sur la fin, il avait étudié avec ardeur les mathématiques, Beyle vint pour la première fois à Paris ; il avait dix-sept ans ; il y arriva le 10 novembre 1799, juste le lendemain du 18 Brumaire : date mémorable et bien faite pour donner le cachet à une jeune âme ! […] Ce temps que vous perdez en vaines discussions compte dans votre vie ; la vieillesse arrive, vos beaux jours s’écoulent : Amiamo, or quando, etc. […] Je suis un sectaire », s’écrie Beyle ; et il développe ce thème très gaiement, en finissant par opposer à la liste de l’Académie d’alors une contre-liste de noms qui la plupart sont arrivés depuis à l’Institut, qui n’en étaient pas encore et que poussait la faveur du public.

1449. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — I. » pp. 473-493

» Le comte de Maistre, dans une des charmantes lettres à sa fille, Mlle Constance de Maistre, a badiné agréablement sur cette question, et il y a mêlé des vues pleines de force et de vérité : « L’erreur de certaines femmes est d’imaginer que pour être distinguées, elles doivent l’être à la manière des hommes… On ne connaît presque pas de femmes savantes qui n’aient été malheureuses ou ridicules par la science. » Au siècle dernier, un jésuite des plus éclairés et des plus spirituels, le père Buffier, qui était de la société de Mme de Lambert, dans une dissertation légèrement paradoxale, s’est plu à soutenir et à prouver que « les femmes sont capables des sciences » ; et après s’être joué dans les diverses branches de la question, après avoir montré qu’il y a eu des femmes politiques comme Zénobie ou la reine Élisabeth, des femmes philosophes comme l’Aspasie de Périclès et tant d’autres, des femmes géomètres et astronomes comme Hypatie ou telle marquise moderne, des femmes docteurs comme la fameuse Cornara de l’école de Padoue, et après s’être un peu moqué de celles qui chez nous, à son exemple, « auraient toutes les envies imaginables d’être docteurs de Sorbonne », — le père Buffier, s’étant ainsi donné carrière et en ayant fini du piquant, arrive à une conclusion mixte et qui n’est plus que raisonnable : À l’égard des autres, dit-il, qui ont des devoirs à remplir, si elles ont du temps de reste, il leur sera toujours beaucoup plus utile de l’employer à se mettre dans l’esprit quelques connaissances honnêtes, pourvu qu’elles n’en tirent point de sotte vanité, que de l’occuper au jeu et à d’autres amusements aussi frivoles et aussi dangereux, tels que ceux qui partagent la vie de la plupart des femmes du monde. Ceci nous mène à Mme Dacier vers laquelle j’arrive et je m’achemine, on peut s’en apercevoir, avec toutes sortes de précautions ; car j’ai pour elle une haute estime, un profond respect que je voudrais voir partagé de tous, sauf par moments le léger et indispensable sourire que, sous peine de n’être plus Français, nous devons mêler à toutes choses. […] Quant aux autres érudits qui travaillaient aux éditions à l’usage du Dauphin, plusieurs n’arrivèrent avec leur contingent que depuis le mariage de Monseigneur : « Et l’on voit bien, dit Bayle, qui ne perd aucune occasion de s’égayer, que la plupart de ces commentaires seront moins pour le père que pour les enfants. » Un travail plus marquant que se donna à elle-même Mlle Le Fèvre fut une édition grecque et latine des Hymnes, épigrammes et fragments de Callimaque (1675), qu’elle mit sur pied en moins de trois mois.

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