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804. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Discours préliminaire » pp. 25-70

Chaque fois qu’appelé à choisir entre différentes expressions, l’écrivain ou l’orateur se détermine pour celle qui rappelle l’idée la plus délicate, son esprit choisit entre ces expressions, comme son âme devrait se décider dans les actions de la vie ; et cette première habitude peut conduire à l’autre. […] Les sophismes, les aperçus appelés ingénieux, quoiqu’ils manquent de justesse, tout ce qui diverge enfin, doit être uniquement considéré comme un défaut. […] Encourager l’esprit dans une nation, appeler aux emplois publics les hommes qui ont de l’esprit, c’est faire prospérer la morale. […] Si les hommes appelés à diriger l’état n’ont point le secret de persuader les esprits, la nation ne s’éclaire point, et les individus conservent, sur toutes les affaires publiques, l’opinion que le hasard a fait naître dans leur tête. […] Il faut se garder de la métaphysique qui n’a pas l’appui de l’expérience ; mais il ne faut pas oublier que, dans les siècles corrompus, l’on appelle métaphysique tout ce qui n’est pas aussi étroit que les calculs de l’égoïsme, aussi positif que les combinaisons de l’intérêt personnel.

805. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre premier. Mécanisme général de la connaissance — Chapitre premier. De l’illusion » pp. 3-31

Deux procédés principaux sont employés par la nature pour produire les opérations que nous appelons connaissances : l’un, qui consiste à créer en nous des illusions ; l’autre, qui consiste à les rectifier. […] Elle la possède donc encore lorsqu’elle est précédée de ses antécédents normaux ; par conséquent, lorsque la tête de mort est réelle et présente, lorsqu’un faisceau de rayons gris et jaunâtres en rejaillit pour aller frapper la rétine, lorsque cette impression de la rétine est propagée le long des nerfs optiques, lorsque l’action des centres sensitifs y correspond, la sensation visuelle ainsi provoquée donnera naissance au même fantôme interne, et le simulacre de tête de mort, qui se produit en nous pendant l’hallucination proprement dite, se produira aussi en nous pendant la perception extérieure, avec cette seule différence que, dans le premier cas, la main, tout autre sens, tout autre observateur appelé à vérifier notre jugement affirmatif, le démentira, tandis que, dans le second, la main, tout autre sens, tout autre observateur appelé à vérifier notre jugement affirmatif, le confirmera ; ce que nous exprimons en disant, dans le premier cas, que l’objet n’est qu’apparent, et, dans le second cas, qu’il est réel. […] Ce sont eux que nous avons nommés images. — Voilà un second groupe de sensations, si semblables aux premières qu’on peut les appeler sensations réviviscentes, et qui répètent les premières, comme une copie répète un original ou comme un écho répète un son. […] Quand le sommeil est venu tout à fait, l’hallucination, qui est au maximum, compose ce que nous appelons nos rêves. — Quand le sommeil, au lieu d’être naturel, est artificiel, le travail hallucinatoire devient plus visible encore. […] Il m’apprend qu’il s’appelle C…, qu’il est le garde du port, puis disparaît pour laisser la place à d’autres personnages.

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